Si l’empreinte diplomatique de la France recule, il n’a pas les conséquences qu’on pourrait imaginer. Les chiffres des ventes d’armes dans le monde pour la période 2019_2023 étant désormais connus, on découvre, dans le classement de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), que notre pays passe devant la Russie dans le classement des exportateurs d’armes au niveau mondial. Aidée, peut-être par le conflit russo-ukrainien mais surtout par les prouesses du Rafale, la France est devenue le deuxième vendeur d’armes au monde.
La domination américaine
Dans cette compétition, les États-Unis restent de très loin les premiers exportateurs d’armes au monde, raflant à eux seuls 42 % du total des ventes.
Pourtant, depuis 2019, la France a vu ses ventes à l’international bondir de 47 %, quand la Russie voyait les siennes chuter de 53 %. C’est un sérieux revers pour Moscou. Revers d’autant plus marquant qu’il intervient dans une période de fortes tensions entre les deux pays.
Mais la France n’avait jamais occupé la deuxième place. Plusieurs raisons expliquent ce succès, pointe le rapport de l’Institut pour la paix de Stockholm : la première est à mettre au crédit d’une production à très forte valeur ajoutée, comme l’avion Rafale de Dassault Aviation.
11% des exportations mondiales
Ainsi, les industriels tricolores ont pesé pour 11% des exportations mondiales sur la période 2019-2023, soit juste un peu plus que leurs homologues russes.
Selon l’institut de recherche suédois spécialisé dans le domaine de l’armement, la plus grande part des exportations d’armes de la France (42%) est destinée aux pays d’Asie et d’Océanie, et 34% aux États du Moyen-Orient.
L’augmentation des exportations françaises d’armements est due en grande partie aux livraisons d’avions de combat à l’Inde, au Qatar et à l’Égypte. Le principal destinataire des exportations françaises d’armes est l’Inde, avec près de 30% de ses exportations, souligne encore le rapport.
La France avait enregistré une année 2022 particulièrement faste. Les exportations d’armement tricolore avaient explosé, atteignant un record historique à près de 27 milliards d’euros. Un montant de prises de commandes hors normes, bien au-delà des précédents records de 2015 (17 milliards d’euros), 2016 (14 milliards), 2021 (11,7 milliards). Le contrat exceptionnel de 80 Rafale signé par les Emirats arabes unis a dopé les exportations d’armement tricolore cette année-là. La France a également vendu, entre autres, des frégates à la Grèce et des satellites espions à la Pologne.
Le choix de la troisième voie
Si ce sont ces pays qui choisissent les armes françaises, c’est pour une bonne raison comme l’indique également le rapport. Pour l’institut sudédois, ce succès tient aussi au fait que les armes françaises sont « Itar Free », c’est-à-dire ne relevant pas de la réglementation américaine sur les ventes d’armes, qui sont généralement très restrictives, notamment en ce qui concerne les missiles.
Différemment du matériel américain, l’armement français donne aux pays une plus grande liberté et la possession totale de ce matériel : les industriels français le garantissent sans lien avec les clauses de la loi américaine sur l’exportation de matériels de guerre.
Outre les performances des matériels, les enjeux internationaux plus larges jouent également. Acheter français est aussi une manière de ne pas s’aliéner les États-Unis: lorsqu’un pays acquiert du matériel russe, il peut se retrouver sur une liste noire américaine et ne pourra pas obtenir des équipements sensibles. La Turquie en a fait l’expérience en s’équipant des batteries sol-air russes S400 : elle s’est ainsi retrouvée exclue de l’achat d’avions F35.
Le matériel français est le choix d’une troisième voie, c’est aussi l’une des raisons du succès de l’industrie de défense française.
Auteur/Autrice
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Loic Pautou est un jeune Français parti en VIE au Vietnam et qui n'est jamais revenu. Propriétaire d'une agence de tourisme à Hanoï, il écrit aussi pour Lesfrancais.press et le Guide du Routard.
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