La France appelle à établir un prix plancher du carbone pour amortir le choc pétrolier

Selon les autorités françaises, la crise sanitaire devrait renforcer la détermination de l’Europe à atteindre les objectifs climatiques de l’accord de Paris, en fixant un prix plancher pour les énergies fossiles.

Alors que le prix du baril oscille autour des 20 dollars, les marchés mondiaux sont submergés par un surplus de pétrole qui risque de mettre à mal la transition vers les énergies propres, prévient la France dans un document de synthèse envoyé aux autres États membres.

« Les prix extrêmement bas des combustibles fossiles » observés ces derniers temps sur les marchés internationaux « ne reflètent pas leur véritable coût pour le climat », indique le document.

« Le prix des énergies fossiles devrait être proportionnel à leur impact environnemental », selon le document interne qu’Euractiv a pu consulter.

Cette note a été envoyée par la France aux délégations nationales en amont d’une vidéoconférence informelle des ministres européens de l’Énergie qui aura lieu ce mardi 28 avril.

« Les autorités françaises estiment que les conditions du marché actuelles plaident clairement en faveur de mécanismes garantissant à ces énergies de rester constamment au-dessus d’un certain prix plancher », du point de vue des consommateurs comme des investisseurs.

D’après le document, un tel mécanisme pourrait se concrétiser au moyen d’un « prix plancher du carbone », établi dans le système d’échange de quotas d’émission (SEQE) de l’UE ou dans la directive sur la taxation de l’énergie — qui est actuellement examinée dans le cadre du « Green Deal ».

Le Royaume-Uni a été le premier pays de l’UE à montrer l’exemple en fixant un prix plancher du carbone en 2013. Mais l’idée fait débat dans les États membres dépendants du charbon, comme la Pologne et les pays d’Europe centrale et orientale, qui risquent d’être durement touchés par cette mesure.

Si cette disposition est adoptée, le prix plancher européen devra s’accompagner de politiques sociales dans les régions en transition où des emplois disparaîtront, a affirmé le président français, Emmanuel Macron, lors d’une conférence à la Commission européenne en 2018.

Réforme du marché du carbone

La France s’inquiète aussi de la baisse des prix de l’électricité sur le marché du carbone. Elle soutient que des mesures urgentes doivent être prises pour éviter un excédent des quotas d’émissions, qui risquerait de faire plonger le prix du carbone.

« À ce titre, les autorités françaises considèrent que [le mécanisme] de réserve de stabilité du marché au sein du SEQE-UE doit être mis en œuvre dans les plus brefs délais pour prévenir le risque de regain d’un excédent structurel », déclare le document.

Selon les Français, « la situation actuelle appelle aussi à l’établissement rapide du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières », afin d’éviter la délocalisation des usines en dehors de l’Europe à cause d’une hausse des prix au sein de l’UE.

Mais ces mesures ne suffiront pas à elles seules à encourager les investissements dans les énergies renouvelables et à assurer une relance verte post-coronavirus, soutient le document.

Plus généralement, la France se dit préoccupée par les prix structurellement faibles de l’électricité qui, selon elle, freinent les investissements dans les capacités de production énergétiques faibles en carbone, dont l’UE a grandement besoin pour accomplir ses objectifs de décarbonisation.

Le document de synthèse atteste que des réformes des politiques communautaires sont nécessaires « pour assurer le financement de la production d’électricité décarbonée ». Mais cela « n’exclut pas les technologies faibles en carbone », précise la France dans une allusion voilée au nucléaire.

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