Au mois d’août 2022, l’euro a perdu 15 % de sa valeur par rapport au dollar du mois d’août 2021 pour descendre sous 1 dollar ce lundi 05 septembre. En revanche, l’euro ne s’est pas déprécié par rapport aux autres grandes devises comme le yen ou la livre sterling. Les non-résidents accroissant encore leur détention d’actions en euros, la position nette ouverte sur l’euro n’est pas négative. La baisse de l’euro est avant tout liée à une appréciation du dollar qui constitue une valeur refuge en période de crise et qui bénéficie du durcissement de la politique monétaire de la FED.
Le potentiel de dépréciation demeure élevé
Le taux de change de l’euro résiste assez bien compte tenu des incertitudes et des risques qui pèsent sur l’Europe : pénurie énergétique, baisse de la croissance, guerre en Ukraine. Cela peut également signifier que le potentiel de dépréciation de l’euro demeure élevé.
Depuis sa création en 1999, l’euro a été confronté à plusieurs crises qui ont pesé sur son cours. Dès 2000, avec l’éclatement de la bulle Internet, il a connu une forte dépréciation en lien avec la forte aversion des investisseurs pour le risque. Le 31 octobre 2000, un euro valait 0,84 dollar contre 1,1789 le 4 janvier 1999. L’euro s’est apprécié entre 2006 et le début du mois de juillet 2008. Il valait alors 1,58 dollars. La crise des subprimes a entraîné un mouvement de repli (1,29 dollar en mars 2009) puis la crise grecque a provoqué un nouvel accès de faiblesse (1,22 dollar en juillet 2012). Du fait d’une politique monétaire moins expansive que celle en vigueur aux États-Unis, l’euro s’apprécie entre 2012 et 2014 (1,39 en mars 2014). La décision de la BCE de s’engager à compter de 2015 dans une politique monétaire non conventionnelle a, à son tour, entraîné une dépréciation de l’euro (1,06 dollar en novembre 2016). Après avoir baissé durant le premier confinement, l’euro reprend des forces entre la mi 2020 et la mi 2021 (1,2 en juillet 2021) avant de s’éroder depuis (parité avec le dollar à la fin août).
En 23 ans d’existence, l’euro n’a accru que marginalement son rôle en tant que monnaie de réserve, ce qui le fragilise. Au moment de sa création, l’euro représentait 19 % des réserves de change mondiale. Ce ratio a atteint 28 % en 2009 avant de se stabiliser à 20 % depuis 2015. Le poids du dollar est passé de 71 à 60 % de 1999 à 2021.
Lors de son lancement, l’euro a pâti de la diminution de l’offre de monnaies qu’il a provoquée. Les investisseurs qui avaient le choix entre plusieurs devises européennes n’en avaient plus qu’une. Dans le cadre de la politique de diversification, ils ont opté pour d’autres monnaies (pays émergents, Australie, Japon, Angleterre, etc.). Cet effet s’est depuis estompé.
Depuis 2015, les non-résidents de la zone euro ont continué à acquérir des actions européennes. Ils ont en revanche réduit leurs achats en obligations. Les résidents européens ont de leur côté accru leurs achats d’actifs à l’extérieur de la zone euro en privilégiant les États-Unis et les pays émergents d’où une dépréciation de l’euro.
L’encours des obligations détenues par les non-résidents est passé de 45 à 38 % du PIB de la zone euro de 2015 à 2021 quand celui en actions est passé de 100 à 125 % du PIB. L’encours en obligations et actions détenues par les résidents est passé de son côté de 120 à 162 % du PIB de 2015 à 2021.
Un rééquilibrage des taux de part et d’autre de l’Atlantique en 2023
La faiblesse de l’euro est la conséquence d’un différentiel défavorable en matière de taux d’intérêt et d’anticipations économiques négatives. Elle est aussi le résultat des problèmes d’approvisionnement en énergie de l’Europe, de la disparition de l’excédent commercial de la zone euro, et de tensions internes qui pourraient se multiplier en cas de difficultés économiques ou politiques. Le processus de dépréciation de l’euro pourrait donc se poursuivre surtout si les non-résidents vendaient leurs actions en euros en cas de forte récession. A contrario, le durcissement de la politique monétaire devrait conduire en 2023 à un rééquilibrage des taux de part et d’autre de l’Atlantique. Les anticipations sont peut-être exagérément pessimistes pour l’Europe.
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