Mais que se passe-t-il en Israël ? Le gouvernement de Benyamin Netanyahou organise à Jérusalem une conférence internationale sur la lutte contre l’antisémitisme. Fait notable, Jordan Bardella et Marion Maréchal y sont conviés. Ce geste des autorités israéliennes pose question : s’agit-il d’une reconnaissance de l’influence de l’extrême droite française dans la défense de la cause juive sur notre territoire national ? Assiste-t-on alors à un tournant historique ?
Face à LFI, le RN ?
De nombreux Français estiment que le parti d’extrême gauche, La France Insoumise (LFI), adopte des positions hostiles envers la communauté juive. Ainsi, la députée des Français de l’étranger, Caroline Yadan, représentant nos compatriotes en Israël, avait dénoncé cette tendance lors d’une interview accordée à notre média en octobre dernier : « LFI est devenu le premier parti antisémite de France », avait-elle affirmé à notre micro. Mais qu’en est-il alors de l’extrême droite ? Est-ce qu’à trop viser la France Insoumise, le passé du parti de Marine Le Pen disparaîtrait ?
Du côté de l’ancien parlementaire de cette circonscription, Meyer Habib, celui-ci avait également mis en lumière le positionnement controversé de la formation politique dirigée par Jean-Luc Mélenchon. Et si l’ancien membre de l’Assemblée nationale nous avait confié lors des dernières élections législatives de 2024 que « pour des questions d’ADN » il ne pouvait « pas avoir le RN comme étiquette politique », il avait reconnu avoir eu des échanges avec Marine Le Pen, la qualifiant de « beaucoup plus fréquentable que cette extrême gauche antisémite ».
Et c’est peut-être cette même démarche qu’ont suivie les autorités israéliennes, en conviant ce jour l’extrême droite à la table de ce colloque à Jérusalem.
Quels impacts sur la politique française ?
De nombreuses polémiques ont émergé concernant les invitations adressées à Jordan Bardella et Marion Maréchal. C’est en effet la toute première fois qu’un membre du Rassemblement national est convié à un tel événement dans l’État hébreu. Que penserait de cette situation le fondateur du FN, Jean-Marie Le Pen, lui qui fut l’objet de nombreuses poursuites pour des faits d’antisémitisme ? L’histoire basculerait-elle ?
Une image réhabilitée du RN ?
En effet, cette invitation marque un véritable impact sur la scène politique française. Tout d’abord elle semble œuvrer à l’exercice de réhabilitation de l’image du parti présidé aujourd’hui par Jordan Bardella. S’exprimer à une telle tribune constitue une occasion sans précédent de se démarquer des propos controversés tenus en 1987 par Jean-Marie Le Pen, qui avait qualifié les « chambres à gaz » de « point de détail de l’histoire de la Seconde Guerre mondiale ».
Pour le Rassemblement national, cette démarche permet également de se positionner sur la scène internationale comme un soutien d’Israël dans la lutte contre l’antisémitisme, tout en envoyant un message directement à ses électeurs en France. Au-delà de cette stratégie d’image, ce geste pourrait aussi poser la question de l’efficacité des actions menées en France pour lutter contre toutes formes de discrimination.
Une opposition entendue ?
Certes, des figures importantes, comme Yonathan Arfi, président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), ont exprimé leur désaccord avec cette invitation. Celui-ci a d’ailleurs indiqué que « cette décision émane d’Israël et n’engage pas les institutions juives de France ». De même, des personnalités comme le grand rabbin du Royaume-Uni, Ephraim Mirvis, ont choisi de ne pas participer à l’événement par crainte des répercussions.
Une répercussion dans les urnes ?
Toutefois, l’intervention de Jordan Bardella lors de la conférence sur l’antisémitisme s’annonce comme un tournant pour le Rassemblement National (RN) et, plus largement, pour la politique en France. Quels seront les échos de cette démarche auprès de notre diaspora française à l’étranger ? Jusqu’à présent, auprès des Français(es) de l’étranger, les candidats affiliés à l’extrême droite n’atteignent pas les scores obtenus par le RN sur le territoire national. Lors du second tour de l’élection présidentielle de 2022, Marine Le Pen avait obtenu 13,86 % des voix parmi les expatriés, alors que son score global avait atteint 41,45 %.
Cependant, une évolution avait été constatée chez certains Français vivant à l’étranger durant les derniers scrutins 2024, où des résultats en croissance ont été enregistrés dans certains pays, notamment auprès de nos ressortissants vivant dans l’État hébreu. Aussi, la présence officielle de Jordan Bardella en Israël soulève des questions sur l’impact que cela pourrait avoir sur la perception que les expatriés auront prochainement du Rassemblement National. Ce changement de perspective parmi les électeurs de la diaspora pourrait-il être significatif ? Le verdict des urnes pourra le mesurer.
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