En 2024, selon le baromètre du cabinet EY, malgré la crise politique survenue au mois de juin, la France est restée le pays européen le plus attractif en matière d’investissements internationaux. L’an passé, le nombre de projets internationaux sur le sol européen a reculé, en raison notamment de la concurrence accrue des États-Unis. Ces derniers attirent les entreprises étrangères grâce au programme d’incitations fiscales connu sous le nom d’Inflation Reduction Act (IRA) mis en place par Joe Biden. Si la France a enregistré une baisse notable des investissements étrangers, elle est néanmoins parvenue à conserver la première place en Europe.
En 2024, les décisions d’investissements internationaux sur son sol ont diminué de 14%, avec 1025 projets recensés. L’Allemagne a connu un recul de 17% (607 projets), et le Royaume-Uni de 13% (853 projets). Les projets d’investissement d’origine allemande en France ont chuté de 34%. Les États-Unis, premier investisseur dans l’Hexagone, ont réduit leurs investissements de 12%, tout comme la Chine (-11%). L’image de la France, malgré les tensions politiques et les déséquilibres budgétaires, demeure globalement positive. À trois ans, 70% des investisseurs interrogés considèrent que l’attractivité du pays s’améliorera; un chiffre en baisse de 5 points sur un an.
109 milliards sur l’IA
La France conserve plusieurs atouts majeurs : sa position géographique centrale, son énergie décarbonée, et la qualité de ses infrastructures. Elle bénéficie également d’une bonne image dans des secteurs d’avenir comme la défense, le quantique et l’intelligence artificielle. Lors du sommet sur l’IA, un programme d’investissement de 109 milliards d’euros a été annoncé en février.
Concernant l’implantation d’usines, un quart des investissements internationaux en Europe en 2024 ont été réalisés en France (415 projets, dont 74 dans l’énergie).
Un faible contenu en emploi
Toutefois, les investissements industriels portés par des capitaux étrangers ont reculé de 22% par rapport à 2023, en raison notamment des difficultés rencontrées dans des secteurs comme la chimie et l’automobile. Dans les faits, les projets menés par des investisseurs étrangers sont majoritairement des extensions ou des réaménagements d’installations existantes. Seuls 15% des projets relèvent de créations ex nihilo. De plus, ces investissements génèrent peu d’emplois : 29 000 créations annoncées pour 2024, soit une baisse de 27% par rapport à 2023. En moyenne, chaque projet d’investissement en France crée 30 emplois, contre 48 au Royaume-Uni et en Allemagne, et 125 en Espagne. Ce faible contenu en emplois s’explique notamment par le coût du travail et la complexité des règles sociales.
D’après Rexecode, le coût horaire du travail en France dans l’industrie et les services s’élevait à 44,11 euros en 2024, contre 43,97 euros en Allemagne, 25,79 euros en Espagne et 16,70 euros en Pologne. Ces deux derniers pays ont enregistré une progression significative des projets d’investissements internationaux (+15 % pour l’Espagne, +13 % pour la Pologne).
La France reste en tête en Europe pour l’accueil de centres de R&D, même si le nombre de projets y a baissé de 15 %. En revanche, pour l’implantation des sièges sociaux, elle reste nettement devancée par le Royaume-Uni. Malgré le Brexit et les efforts des autorités françaises, la place financière de Paris ne parvient pas à concurrencer celle de Londres.
Un leadership fragile
Si la France conserve sa première place en Europe en matière d’attractivité pour les investissements étrangers, ce leadership est désormais plus fragile. La baisse du nombre de projets, leur moindre intensité en emploi et la faible part des créations ex nihilo traduisent un essoufflement structurel. Plusieurs freins pèsent encore sur l’attractivité française : l’accès au foncier, le coût de l’énergie, le niveau de qualification moyen des actifs, et la faible robotisation des sites industriels. L’atonie de la croissance économique et de la consommation intérieure constitue également un sujet d’inquiétude.
À l’heure où la compétition mondiale s’intensifie, notamment sous l’effet des stratégies offensives des États-Unis et des pays d’Europe centrale, la France doit impérativement lever les freins persistants : complexité administrative, coût du travail, faible productivité industrielle. Le pari d’une montée en gamme dans les secteurs d’avenir, comme l’intelligence artificielle, la défense ou l’aéronautique, ne pourra pas être gagné sans un effort en matière de formation, d’innovation et d’efficacité de l’action publique.
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