Après la présentation du projet de loi sur l’immigration en Conseil des ministres, mercredi 1er février, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin s’est dit « certain » que le gouvernement arriverait à « un compromis sans dénaturer le texte ». L’occasion pour nous, Français de l’étranger, immigrés dans un autre pays, de faire le point sur l’immigration en France.
7,7 millions de personnes d’immigrés en France
La population immigrée représente 7,7 millions de personnes. Elle se répartit entre, d’une part, les étrangers immigrés (5,2 millions, soit 7,7 % de la population française) et, d’autre part, les immigrés naturalisés français (2,5 millions, soit 3,7 % ). Parmi la première catégorie, 800 000 sont nés en France. La population d’étrangers nés à l’étranger est donc de 4,5 millions, soit 6,6 % du total.
La population immigrée est donc en augmentation. Elle représente aujourd’hui 10,4 % de la population, contre 7,4 % en 1975 et 4,4 % après la guerre en 1946. En 2020, le solde migratoire, différence entre les entrées et les sorties, était de 215 000 (estimation Insee). En moyenne, selon l’Insee, « quatre immigrés entrent sur le territoire national lorsqu’un en sort ».
Les Français de plus en plus multiculturels
Autre composante du métissage culturel, les Français nés à l’étranger. Ils sont 1,7 million soit 2,5 % de la population. En les ajoutant aux 7 millions d’immigrés nés à l’étranger, on obtient 8,7 millions. Près d’un habitant de l’Hexagone sur huit (12,9 %) est donc né hors de France.
Parmi eux, 41 % des immigrés sont nés en Afrique, 32 % en Europe, 16,1 % en Asie et 10,9 % en Amérique et Océanie. À partir du milieu des années 2010, les femmes sont plus nombreuses à immigrer que les hommes (52 % en 2021).
Un avantage économique ?
Le projet de loi immigration examiné ce mercredi 1er février 2023 prévoit, parmi les mesures phares présentées par Gérald Darmanin et Olivier Dussopt, la création d’un titre de séjour pour les « métiers en tension », qui permettrait de régulariser les travailleurs immigrés en situation irrégulière, autrement dit, les travailleurs sans papiers, ainsi que plus généralement de valoriser « l’intégration par le travail ».
Car si les immigrés sont, par les partis d’extrême-droite et même quelques personnalités de droite, la cause de tous les malheurs de la France, la réalité économique raconte une toute autre histoire. Comme au Royaume-Uni, qui est désormais privé des expatriés d’Europe de l’Est depuis leur sortie de l’Union européenne, les immigrés sont indispensables au bon fonctionnement de l’économie française.
Pourtant leur intégration à notre environnement économique reste une difficulté majeure. Ainsi en 2019, selon l’Insee, les immigrés ont un taux de chômage très supérieur aux personnes nées en France : 13,6 % contre 7,8 %. L’inégalité se creuse quand on ne considère que les immigrés non européens, pour lesquels le taux atteint 15,7 %. Cette situation s’explique par le différentiel de qualification.
Selon l’Observatoire des inégalités, « 40 % des immigrés de 15 à 64 ans disposent au maximum du brevet des collèges ou du certificat d’études primaires, contre 26 % pour l’ensemble de la population de cette tranche d’âge vivant en France ». Par ces données, le ministère de l’Intérieur justifie la création d’un titre de séjour spécifique. Une politique qui est courante dans de nombreux pays comme le Royaume-uni, le Canada, les USA, l’Australie, etc.
Moderniser l’accueil des réfugiés et des immigrés économiques
Mais Gérald Darmanin propose une loi aux implications beaucoup plus larges. Le texte se décline en vingt-cinq articles avec donc la création d’un un titre de séjour « métiers en tension » accessible aux travailleurs sans papiers mais aussi le conditionnement de l’octroi de titres de séjour pluriannuels à la maîtrise d’un certain niveau de français, la réforme de la procédure de demande d’asile pour raccourcir les délais d’instruction, le renforcement de la « double peine » en levant certaines protections à l’éloignement à l’encontre d’étrangers délinquants ou encore la possibilité de retirer un titre de séjour à un étranger « en cas de rejet des principes de la République« .
Ainsi la finalité de tout cela selon l’opposition, serait de gonfler les chiffres de l’application des OQTF (obligation de quitter le territoire français), pour l’instant en dessous des 10%.
Autre point du projet de loi qui fait débat, faire qu’un juge unique ait la possibilité de prendre les décisions, plutôt que de fonctionner de manière collégiale. Sur le principe, cela doit permettre d’accélérer les procédures d’asile et d’expulser plus rapidement. Dans le même temps, seraient mises en place des chambres territoriales pour faciliter l’accessibilité des demandeurs sur le territoire. Il est aussi prévu de regrouper les agents de l’Office français de l’immigration et l’intégration (Ofii), de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) et des préfectures sous la bannière « France Asile » afin de traiter plus rapidement les dossiers.
Le vote à l’Assemblée nationale
Alors que tous les yeux sont tournés sur le projet de loi retraite qui commence à être discuté en commission à l’Assemblée Nationale, l’adoption de cette loi par le parlement s’annonce aussi très délicate.
Comme pour le projet de réforme des retraites, pour que la loi soit adoptée, ses deux auteurs, les ministres Olivier Dussopt et Gérald Darmanin, comptent passer un accord avec la majorité de droite du Palais du Luxembourg. Assiste-t-on à l’esquisse d’une alliance durable entre Renaissance et Les Républicains ?
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