Le débat parlementaire autour d’une loi européenne relative au haut débit est marqué par d’importants désaccords, notamment sur l’intégration des entreprises de construction de pylônes et les délais de permis. Le sujet controversé d’un « péage numérique » pour financer les infrastructures télécom se profile à l’arrière-plan.
Le Gigabit Infrastructure Act (GIA) est une proposition législative visant à accélérer le déploiement des réseaux haut débit dans l’Union européenne. La semaine dernière, les législateurs européens ont déposé quelque 400 amendements, fixant ainsi les principales lignes de démarcation et les désaccords.
Le rapporteur du Parlement sur le dossier, Alin Mituţa, a reçu un large soutien pour sa proposition d’abolir les appels intra-UE, mais il devra faire face à des sujets plus complexes, tels que la mise en œuvre — potentielle — d’un « péage numérique ».
« Péage numérique »
Un amendement déposé par les législateurs conservateurs François-Xavier Bellamy et Othmar Karas (Parti populaire européen, PPE), avec le soutien de l’eurodéputée progressiste Adriana Maldonado López (Socialistes et Démocrates, S&D), souligne la « nécessité d’établir un cadre politique dans lequel les grands générateurs de trafic contribuent équitablement au financement adéquat des réseaux de télécommunications sans préjudice de la neutralité de l’Internet ».
Un autre amendement déposé par le centriste Bart Groothuis (Renew Europe), aux côtés de Mme Maldonado López, met l’accent sur les « politiques qui stimulent la demande de connectivité ».
« Ces politiques doivent prendre en compte l’impact sur les consommateurs et ne pas créer de distorsions sur le marché », précise l’amendement.
Tous ces amendements font référence au débat qui fait rage sur un potentiel « péage numérique », une proposition controversée du commissaire européen au Marché intérieur Thierry Breton visant à faire contribuer les grands générateurs de trafic Internet aux investissements des infrastructures télécom.
Une proposition — pas encore présentée officiellement par la Commission — plébiscitée par les eurodéputés mais largement rejetée par les grandes entreprises digitales et de nombreux fournisseurs de réseaux alternatifs, qui s’inquiètent d’une perte de compétitivité dans la production de nouveaux contenus numériques.
Cependant, l’eurodéputé M. Mituţa s’est montré inflexible : il ne veut pas que le débat sur un « péage numérique » s’inscrive dans les négociations pour le GIA. Ces deux propositions sont indépendantes l’une de l’autre, selon lui, et insiste pour que ces amendements soient rejetés.
Construction de pylônes
La réglementation s’appliquant aux sociétés de construction de pylônes semble être un point de désaccord majeur entre les élus.
Comme l’a précédemment rapporté EURACTIV, le rapporteur fictif de centre droit Angelika Winzig (PPE) veut renforcer le contrôle réglementaire sur ces sociétés. En revanche, sa collègue Angelika Niebler veut exclure du champ d’application du texte les « sociétés de construction de pylônes qui offrent seulement un accès passif ».
Quant à M. Mituţa, soutenu dans sa démarche par un amendement de centre droit de Massimiliano Salini (PPE), il suggère d’obliger les « propriétaires de terrains » sur lesquels les installations devraient être construites à « négocier l’accès » dans des « conditions justes et raisonnables ».
Les amendements portent également sur la capacité de la Commission européenne à prendre des actes délégués sur les rapports concernant le marché des sociétés de construction de pylônes.
Approbation tacite
Mme Winzig et Beatrice Covassi (S&D), rapporteure fictive de centre gauche sur le dossier, ont suggéré de supprimer la disposition relative à l’« approbation tacite », c’est-à-dire le principe selon lequel l’approbation est présumée si l’autorité ne répond pas à une demande d’autorisation dans le délai requis.
Le rapporteur M. Mituţa suggère un délai de trois mois avec la possibilité de ne renouveler le permis qu’une seule fois.
Certains députés de la droite et du centre ont soutenu ce délai de trois mois, tandis que Mme Covassi cherche à le raccourcir à deux mois.
Cependant, plusieurs amendements vont dans la direction opposée et visent à rendre la disposition moins prescriptive, notamment en supprimant de telles dispositions ou en suggérant que les pays de l’UE fixent leurs propres délais.
Point d’information unique
Le projet de législation introduit un guichet unique pour les informations et les procédures au niveau national. Les parlementaires sont divisés quant aux données qu’ils souhaitent y voir figurer et quant à la personne responsable.
Alin Mituţa a introduit davantage d’éléments à publier par ces points d’information, tels que les décisions de règlement des différends.
L’eurodéputé Mme Winzig est allée dans la direction opposée, suggérant que dans les zones rurales, les opérateurs pourraient ne pas avoir la capacité de fournir toutes les données nécessaires et devraient les fournir sur demande.
Un amendement de la députée Elena Kountoura (Gauche européenne) demande aux pays de l’UE de « dresser un inventaire préliminaire des informations existantes » afin d’éviter les doublons.
Terminologie
Le débat a également porté sur le terme juridique approprié pour qualifier les bâtiments publics « prêts pour la fibre optique ».
Plusieurs amendements remettent en question ce terme, suggérant plutôt les terminologies « prêts pour le haut débit », « prêts pour le réseau à très haute capacité [Very High Capacity Networks, VHCN] » ou « prêts pour la fibre optique et équipés d’un Internet mobile à haut débit 5G fonctionnel ».
Communication par satellite
L’amendement de l’écologiste Niklas Nienaß visant à inclure la constellation de satellites a été cosigné par un eurodéputé de centre droit et un eurodéputé de centre gauche. Cependant, il n’est pas certain que cet amendement soit suffisamment soutenu pour être intégré dans le texte.
Le vote en commission sur le dossier est actuellement prévu le 19 septembre.
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