Grèce : redressements fiscaux en pagaille pour les Français

Grèce : redressements fiscaux en pagaille pour les Français

L’un des avantages du marché intérieur est que les citoyens et les entreprises de l’UE ont la liberté de circuler, d’exercer des activités et d’investir au-delà des frontières nationales. Toutefois, la fiscalité directe n’étant pas harmonisée au niveau de l’Union, certains contribuables parviennent, du fait de cette liberté, à éviter ou à éluder l’impôt dans leur pays de résidence. Ce dernier a généralement le droit, conformément aux conventions fiscales bilatérales, d’imposer les revenus et les actifs mondiaux, même s’ils sont imposés dans l’autre pays. Il est clair qu’il ne doit pas y avoir de double imposition non plus. Des accords ont été mis en place pour éviter ce risque… Et pourtant en Grèce, les expatriés Français sont confrontés à une série de redressement fiscaux.

Echange automatisé des données fiscales

Pour la première fois, dans le cadre des mécanismes européens d’échange d’information, le fisc grec a reçu des informations sur les revenus des résidents fiscaux en Grèce de la part des administrations fiscales d’autres États membres de l’Union européenne dont la France. Elles ont été utilisées quelle que soit la profession des résidents.

Le fisc grec a donc pu contrôler, cette année, un certain nombre de résidents français. Et la conclusion des services fiscaux grecs est très claire concernant ces Français:  Ils ont « un assujettissement à l’impôt inférieur à celui identifié par l’administration fiscale sur la base des données issues de l’échange d’informations » selon le porte-parole au magazine Marianne.

Les fonctionnaires en ligne de mire

Les fonctionnaires, eux, pensaient « être au clair avec les administrations fiscales des deux pays », dixit Marie (le prénom a été changé), enseignante au lycée depuis une quinzaine d’années.

« J’ai toujours rempli ma déclaration d’impôts en suivant les recommandations des services de l’ambassade de France en Grèce. Et depuis la quinzaine d’années que je vis en Grèce, j’ai toujours payé mes impôts en France. »

Une professeure du Lycée Français d’Athènes

Pour ce faire, les enseignants comme l’ensemble des fonctionnaires détachés s’appuyaient sur la convention fiscale binationale signée en 1963. Ce texte explicite les conditions pour éviter la double imposition. En théorie, il permet donc aux fonctionnaires et salariés français, détachés en Grèce, de ne payer leurs impôts qu’en France.

Sauf que dès qu’elle a reçu les données fiscales françaises, l’administration grecque a visiblement modifié sa lecture de la convention, pour la première fois depuis des décennies. Sur les salaires des fonctionnaires, l’imposition est dans l’ensemble plus favorable en France qu’en Grèce.

Un délai de 2 ans maximum

Pour le fisc grec la possibilité offerte aux Français de continuer à payer les impôts en France est limitée à une période de 24 mois consécutifs en Grèce.

 « La convention binationale de 1963, pour éviter la double imposition, leur permet de payer leurs impôts en France, sous la condition qu’ils restent en Grèce deux ans au maximum ! »

Un haut fonctionnaire à Athènes pour l’AFP

Cette nouvelle interprétation a de lourdes conséquences pour nos compatriotes sur place et en particulier pour les fonctionnaires pour lesquels l’imposition en France leur était plus favorable.

Et ces derniers ne peuvent compter sur Bercy qui laisse entendre que ces derniers auraient cherché à échapper au fisc grec.

« Les contribuables français redressés l’ont été dans le cadre du strict respect de la convention fiscale. »

Porte-parole de Bercy à l’AFP

Parmi les fonctionnaires frappés par ces redressements, les professeurs des établissements scolaires représentent la grande majorité et pour eux la règle des « deux ans » ne s’applique qu’aux professeurs des universités qui viennent séjourner en Grèce dans le cadre des échanges entre les universités.

Mais le fisc grec ne l’entend pas ainsi. Des montants, équivalents à plusieurs mois du salaire moyen d’un enseignant, sont désormais réclamés (jusqu’à 30 000 euros). Et l’inquiétude est grande, ces premiers redressements fiscaux ne concernent qu’une année de redressement, 2014 !

Emmanuel Macron et le Premier ministre grec

L’Assemblée des Français de l’étranger mobilisée

Et pourtant dès le mois de mars 2021, L’Assemblée des Français de l’étranger a questionné le gouvernement sur cette situation. Et la réponse donnée laissait plus espérer une bonne fin :

« Si la Grèce dispose, au même titre que la France, d’un droit d’imposer de telles rémunérations, il lui appartient toutefois d’éliminer la double imposition par l’octroi d’un crédit d’impôt égal à l’impôt payé en France.
Le MEFR a indiqué au MEAE que le directeur général des finances publiques et son homologue grec étaient convenus de réexaminer la situation fiscale des contribuables concernés afin de déterminer s’ils avaient bien bénéficié d’une application correcte de la convention fiscale bilatérale et n’avaient été imposés que sur un différentiel d’imposition.
« 

Réponse du gouvernement à l’assemblée des Français de l’étranger

Malgré l’échange entre les gouvernements, le fisc grec compte bien continu son opération. Pour les Français en Grèce, les contrôles fiscaux ne font que commencer.

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