Le 19 juin, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a ordonné l’introduction de l’anglais dans le cycle primaire aux côtés du français. Une décision qu’Emmanuel Macron, en voyage à Alger, il y a quelques semaines, n’a pas réussi à faire annuler. Mais alors quel avenir pour la Francophonie en Algérie ?
Une décision contre la France
A priori, il ne s’agit que de l’introduction d’une deuxième langue étrangère dans le cycle primaire. Mais quand on sait dans quel contexte cela a été décidé, on est en droit de se demander si ça ne vise pas à remplacer, à terme, le français et, par là même, à se détacher graduellement de la francophonie et de la culture française.
Le sentiment partagé par un certain nombre d’observateurs locaux est que le pouvoir en place, en mal de légitimité, semble céder à un puissant sentiment anti-français dans la société, où les appels à remplacer le français par l’anglais dans l’enseignement comme dans la vie publique n’ont jamais été aussi forts que depuis quelques années. En effet, les autorités avaient déjà commencé à imposer l’anglais, notamment dans les correspondances et les enseignes de l’armée et de certains ministères, dont, au premier, celui de l’Enseignement supérieur.
Le facteur qui a sérieusement accéléré ce processus de «défrancisation» et l’émergence de ce courant idéologique, fut incontestablement le brusque raidissement des relations franco-algériennes après les fameuses déclarations du président Emmanuel Macron contre le «système politico-militaire» algérien, en octobre 2021. C’est pourquoi de nombreux intervenants accusent le gouvernement de vouloir imposer un choix éminemment politique au détriment de l’avenir pédagogique de millions d’élèves. Ces derniers devraient donc, à partir de cette année, avoir quatre langues à apprendre: l’arabe, le français, le tamazight et l’anglais.
Une rentrée scolaire bousculée
Si le programme s’annonce chargé pour les écoliers, la rentrée scolaire en Algérie, même reportée au 21 septembre, prend des airs de course contre-la-montre pour les professeurs et le corps administratif. En effet, l’apprentissage de l’anglais commençait au collège, désormais introduit dès la troisième année du cycle primaire (l’équivalent du CE2 en France), à raison de deux séances de 45 minutes par semaine, il a fallu dans les quelques semaines séparant la décision présidentielle de la rentrée tout organiser, inventer.
Et le gouvernement algérien a réussi son pari, en moins de deux mois. Pour cela, il a mis au point un programme et confectionné un million et demi d’exemplaires du nouveau manuel destiné aux élèves de troisième année d’école primaire et à le distribuer à travers tout le territoire national. Mieux, il a réussi le tour de force de recruter quelques 5.000 enseignants contractuels et à leur assurer une formation. En sachant que le ministère avait enregistré, dès la première semaine d’août, près de 60.000 postulants.
Rayonnement culturel et économique
Le 21 septembre, les écoliers algériens vont donc apprendre le français et l’anglais, étant, si jeunes, déjà la proie de combats politiques et idéologiques. Ainsi va le camp des partisans de l’anglais, l’influenceur Saïd Bensedira déclare que l’anglais est «la langue universelle» et que le français n’est qu’un «butin de guerre»…
Mais la France tient à préserver son rayonnement culturel, qu’elle travaille de toutes ses forces pour le préserver car elle sait très bien que ses intérêts sont protégés tant qu’elle est culturellement et linguistiquement dominante. Politiquement et économiquement, elle l’est, bien que le français ne soit pas une langue officielle en Algérie, mais il n’est pas non plus complètement étranger à la nation algérienne.
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