Plus de deux mois après la suspension de ses vols entre Paris et Bamako, Air France devait retrouver le tarmac de l’Aéroport international Modibo-Keïta, le 13 octobre. Mais l’occasion était trop belle pour la junte d’humilier la France.
Pourtant, l’exploitation ne devait pas se faire en direct, mais par le biais d’une tierce compagnie, le portugais EuroAtlantic Airways, dont un Boeing 777-200 ER était mis à la disposition du pavillon français avec son personnel navigant.
Un colonel limogé
Le colonel Drissa Koné, directeur de l’Agence nationale de l’aviation civile (Anac), celui-là même qui s’était ému de l’arrêt des vols d’Air France en août dernier face à la situation géopolitique et aux risques sécuritaires, a eu l’impudence de négocier avec la compagnie française la reprise des vols sans en référer aux plus hautes instances de la junte. Il a été limogé et l’autorisation a été annulée.
Les relations entre la France, l’ancienne puissance coloniale qui s’était engagée militairement au côté de l’armée malienne contre une offensive jihadistes en 2013, et le Mali se sont fortement détériorées depuis que des colonels ont pris le pouvoir par la force à Bamako en août 2020. La junte a poussé les forces françaises vers la sortie en 2022 et s’est tournée politiquement et militairement vers la Russie. Elle a d’ailleurs expulsé l’ambassadeur français.
Pas de visa
En sus, le Mali a suspendu la délivrance de visas aux ressortissants français par ses services consulaires, et ce, « en application de la réciprocité » a déclaré jeudi 10 août sur Facebook l’ambassade du pays à Paris. Le pays assure que la France a, la première, suspendu la délivrance de ces visas après avoir placé tout le Mali, y compris Bamako, en zone rouge. Joint par franceinfo, le Quai d’Orsay a confirmé jeudi avoir « suspendu la délivrance des visas au Mali », évoquant des « tensions régionales croissantes ».
"Tout déplacement au Mali est formellement déconseillé. Les ressortissants français au Mali sont appelés à la plus grande vigilance",
Le ministère français des Affaires étrangères sur son site, dans une mise à jour de ses fiches pays datée du 7 août.
« Cette modification entraîne une réorganisation des services de l’ambassade de France à Bamako, qui ne pourra dès lors plus délivrer de visas jusqu’à nouvel ordre », souligne sur son site internet Capago, prestataire traitant les demandes de visa en amont de l’instruction des dossiers par les services français.
Depuis, la France a vu d’autres gouvernements alliés au Sahel se faire renverser par des militaires, au Burkina Faso en 2022 et au Niger fin juillet. L’intégralité de ces trois pays voisins, tous confrontés à l’expansion jihadiste et formant une immense aire géographique, est désormais en zone rouge pour la diplomatie française. La France a également suspendu la délivrance de visas par ses services au Burkina Faso, stipule le site de Capago.
Auteur/Autrice
-
Samir Kahred a suivi ses parents dont le père était ingénieur dans une succursale du groupe Bouygues. Après une scolarité au Lycée français et des études au Caire, il devient journaliste pour des médias locaux et correspond pour lesfrancais.press
Voir toutes les publications