Français et polygame : quelles conséquences ? 

Français et polygame : quelles conséquences ? 

Jamais les Français n’ont eu autant de liens avec l’étranger. Pour le travail, pour la famille, pour des projets de vie. La dimension internationale forge le quotidien de plusieurs millions de foyers. Tous les jours, des millions de Français interagissent à l’international. Et parfois, certains volontairement ou involontairement peuvent se retrouver dans une situation de polygamie ! Une situation interdite en France et qui peut avoir de lourdes conséquences dans l’hexagone mais plus globalement sur le citoyen. Dans certains cas, la nationalité peut même lui être retirée.

Qu’est-ce que la polygamie ?

En droit français, la polygamie est le fait de contracter un second mariage sans avoir mis fin au premier. Elle est interdite par l’article 147 du Code civil : “On ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier”. Tout contrevenant est punissable d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende (article 433-20 du Code pénal). Mais cette disposition ne concerne que les mariages civils et non les mariages religieux, qui ne sont pas nécessairement enregistrés sur les états civils. Le fait de vivre avec plusieurs femmes sans être marié avec elles n’est pas répréhensible par la loi.

Même en se mariant à l’étranger ?

Le mariage à l’étranger d’un Français ou d’une Française, même de double nationalité, et d’un(e) étranger(e) polygame n’est pas valable en France. L’interdiction, pour un ressortissant français, de contracter une union polygamique, est absolue et l’exigence de monogamie suit le Français quel que soit le pays où il aille se marier ! 

En revanche, les mariages célébrés à l’étranger sont reconnus comme valables au fond s’ils sont conformes à la loi personnelle de chacun des époux. La jurisprudence admet la reconnaissance en France d’un mariage célébré à l’étranger en état de bigamie, à condition que les lois nationales de chacun des époux autorisent la bigamie. Dans un tel cas, l’ordre public français, en raison de ses effets atténués, ne s’oppose pas à ce qu’un mariage polygamique contracté régulièrement à l’étranger selon la loi locale produise en France des effets d’ordre successoral au bénéfice d’une seconde épouse et de ses enfants légitimes. Seule exception, déjà ci-dessus rappelée : un tel mariage ne produira aucun effet en France lorsque l’un des époux possède également la nationalité française.

Français et polygame
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Quid des successions ?

La polygamie est interdite en France. Mais, si ces mariages ont eu lieu à l’étranger, les épouses sont considérées comme régulières au regard de la succession, ce qui est confirmé par la jurisprudence. Il y a donc plusieurs conjoints survivants dans ce cas. Aucune ne peut être exclue de l’héritage : chacune aura une part. Cependant, si l’une des épouses dispose de la nationalité française, un autre mariage ne peut pas lui être opposé. Par ailleurs, si le défunt avait une maison en France où il résidait avec deux épouses, le droit de rester dans la maison leur appartient à toutes les deux. En pratique, cela est particulièrement délicat.

Aussi, notons qu’en France, le principe de la « réserve successorale » s’impose : les enfants ont droit de facto à une part de l’héritage, déterminée par la loi. Sans enfant, un pourcentage est réservé au conjoint survivant. Dans les pays anglo-saxons, cette « réserve » n’existe pas. Très souvent, c’est le testament qui détermine les ayants droit.

Peut-on être déchu de sa nationalité pour polygamie ?

En ce début d’année, un Français installé au Maroc s’est retrouvé en situation de polygamie, dans ce dit pays. La presse annonçait un possible retrait de sa nationalité. Est-ce même possible ?

La déchéance de la nationalité est décidée par décret, après avis conforme du Conseil d’État. Elle est encadrée par l‘article 25 du Code civil, qui prévoit cinq cas pour lesquels un individu peut être déchu de la nationalité française. Il faut notamment qu’une personne ait été condamnée « pour un crime ou délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou un acte de terrorisme », ou qu’elle se soit livrée « au profit d’un État étranger à des actes préjudiciables aux intérêts de la France ».

Plusieurs restrictions existent néanmoins :

– Cette décision ne doit pas le rendre apatride – en clair, il doit avoir une double nationalité.

– Les faits reprochés doivent avoir eu lieu avant l’acquisition de la nationalité française, ou dans un délai de dix ans à partir de cette acquisition.

Ainsi pour éventuellement déchoir un citoyen coupable de polygamie de sa nationalité, il faut prouver qu’il était déjà marié civilement avec une autre femme avant cette date. Dans ce cas, le mariage contracté en 1999 sera considéré comme nul, et une procédure en extranéité (retrait de la nationalité) pourra être lancée si aucune restriction citée plus haut s’y oppose. Le fait de pratiquer la polygamie étant considéré comme une atteinte aux droits fondamentaux des Français et donc de la Nation. 

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