Les 150 citoyens de la convention ont remis cet après-midi leurs propositions à la ministre de la transition écologique et solidaire, Elisabeth Borne.
C’est le point d’orgue de plusieurs mois de débats. La convention citoyenne pour le climat a rendu dimanche 21 juin après-midi ses propositions pour lutter contre le réchauffement climatique « dans un esprit de justice sociale ».
La ministre de la transition écologique et solidaire, Elisabeth Borne, qui a reçu au nom de l’exécutif les propositions, a salué leur « ambition ».
« Le président de la République [prépare] une reconstruction économique, écologique et solidaire. Votre travail sera au cœur du projet », leur a-t-elle lancé, assurant qu’il n’y aurait « pas de tabou ». Elisabeth Borne
Le parti écologiste EELV a fait part de son soutien à l’ensemble des propositions, appelant le gouvernement à se saisir « globalement » des propositions formulées, les présentant comme « un tout indissociable », même s’il regrette « l’absence de la taxe carbone » et « l’oubli du nucléaire ». La droite et le Rassemblement national se sont pour leur part montrés plus critiques. S’il salue le travail accompli, Jean-Luc Mélenchon a, quant à lui, regretté qu’il n’y ait « rien sur les conduites d’eau » et « rien sur le nucléaire ».
Les 150 citoyens tirés au sort ont voté dimanche matin en faveur d’un référendum visant à introduire la lutte contre le changement climatique dans la Constitution et à créer le crime d’« écocide ». En revanche, ils ont rejeté l’idée d’utiliser le référendum pour d’autres mesures spécifiques. « Pour le reste, que le pouvoir prenne ses responsabilités », a lancé un des participants, résumant les arguments avancés par la plupart des intervenants.
Interrogée dans Le Journal du dimanche (JDD), Elisabeth Borne s’était déclarée, « à titre personnel », « favorable à un référendum ». « Des questions multiples permettraient de partager les travaux » de la convention « avec tous les Français ». « L’organisation prendrait du temps, mais ce serait utile pour faire mûrir la conscience écologique », juge-t-elle.
Emmanuel Macron, lui, s’est à plusieurs reprises dit ouvert à l’idée d’interroger directement les Français sur les questions environnementales. Le président de la République doit recevoir les membres de la convention le 29 juin pour leur apporter de « premières réponses ».
Le chef de l’Etat avait décidé d’organiser cet exercice de démocratie participative inédit en France après la crise des « gilets jaunes », déclenchée par l’annonce d’une taxe carbone sur les carburants. Les propositions de la convention arrivent aussi au moment où l’exécutif travaille sur son plan de relance face à la récession dans laquelle la pandémie a plongé l’économie.
Réduction de la vitesse à 110 km/h
La convention, mandatée pour proposer des mesures permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 %, n’a en tout cas pas remis sur la table l’idée d’une telle taxe, mais proposé près de 150 autres mesures.
Une des plus controversées, la réduction du temps de travail à quatre jours (28 heures) par semaine, a été largement (65 %) écartée samedi. C’est la seule proposition à ne pas avoir été adoptée par les membres. Outre les conséquences sur les entreprises, beaucoup se sont inquiétés de l’image que donnerait de leurs travaux une telle proposition. « On va passer pour des guignols », avait ainsi lancé l’un d’entre eux.
Autre mesure qui devrait diviser l’opinion publique : la réduction de la vitesse sur autoroute de 130 km/h à 110 km/h a recueilli 60 % des suffrages. La proposition a, sans surprise, déclenché l’ire des associations d’automobilistes, faisant écho au mouvement d’opposition déjà déclenché par la limitation de la vitesse à 80 km/h sur les routes secondaires.
Plusieurs autres mesures visent à réduire la place de la voiture individuelle, avec notamment une « amélioration du forfait mobilité durable ». La convention propose aussi de renforcer le bonus-malus écologique sur les véhicules, les aides à la location longue durée et des prêts à taux zéro pour l’achat de véhicules propres, l’interdiction dès 2025 de la vente de véhicules neufs très émetteurs (+ 110 g de CO2/km), et d’interdire les centres-villes aux véhicules les plus polluants.
« Ecocide »
Parmi les autres mesures figure un encadrement fort de la publicité, avec interdiction des panneaux dans l’espace public extérieur et de la pub pour des produits à fort bilan carbone – comme les gros véhicules de type SUV. De lourdes taxes sur l’alimentation ultratransformée sont également envisagées, ainsi que l’interdiction des semences OGM (organisme génétiquement modifié), une taxation plus forte des engrais azotés et la réduction de moitié en 2030 de l’usage des pesticides, et l’interdiction des plus dangereux d’ici à 2035.
La liste comprend également l’interdiction des terrasses chauffées ou de l’éclairage des magasins la nuit, ou encore une taxe sur les dividendes des sociétés pour financer la transformation de l’outil productif.
La convention souhaite par ailleurs l’introduction dans le droit pénal français du crime d’« écocide », une proposition rejetée récemment au Sénat et à l’Assemblée nationale, et la création d’une « haute autorité » chargée de faire respecter les « limites planétaires » jugées soutenables pour la survie de l’humanité (réchauffement climatique limité à 2 °C par exemple).
Elle demande enfin l’inscription dans la Constitution de la préservation de la biodiversité, de l’environnement et de la lutte contre le dérèglement climatique, la création d’un « Défenseur de l’environnement ». Les participants souhaiteraient également que soit renouvelée l’expérience de convention citoyenne, éventuellement dans le cadre d’une réforme du Conseil économique, social et environnemental (CESE), qui a accueilli leurs travaux.
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