Avec plus de 31 % des suffrages, selon les premières estimations, le Rassemblement national (RN) de Jordan Bardella remporte les élections européennes en France et devrait constituer la délégation la plus importante du Parlement.
« Profites-en, ça arrive qu’une fois tous les cinq ans ça ! », crie un militant à sa compagne, en slalomant entre les convives et les journalistes, à la recherche d’une photo pour immortaliser une victoire historique.
Le RN vient de faire un score inédit à une élection européenne. Double conséquence : le parti d’extrême droite envoie au Parlement européen la plus grande délégation de toute l’Europe et pousse le président Emmanuel Macron à dissoudre l’Assemblée nationale.
En attendant des résultats définitifs, plus de 30 députés du RN devraient rejoindre le Parlement européen, sur les 81 sièges français à pourvoir, soit plus que les conservateurs allemands de la CDU/CSU, crédités de 29,5 % des suffrages, et qui devraient obtenir 29 sièges.
« C’est canon ! », déclare à Euractiv l’eurodéputé RN non reconduit Jean-Lin Lacapelle. « Mais restons vigilants et attendons les résultats des grandes villes ».
Dissolution de l’Assemblée nationale
C’est la 3e fois consécutive que le RN remporte les élections européennes. Mais contrairement à 2014 (24,9 %) et à 2019 (23,3 %), un écart conséquent sépare le parti de Marine Le Pen de ses concurrents, en premier lieu de la liste Renaissance soutenue par le président français, qui atteint péniblement les 15 %.
Un écart qui selon Jordan Bardella, « traduit un désaveu cinglant et un rejet clair de la politique conduite par Emmanuel Macron ». À la tribune, le président du RN a immédiatement demandé au président de prendre ses responsabilités et d’organiser de nouvelles élections législatives.
Dans une allocution télévisée, ce dernier a peu après annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale. Un scrutin anticipé sera donc organisé les 30 juin et 7 juillet prochains.
Le meilleur score de l’histoire du RN
Au Parlement européen, la victoire du RN « acte déjà l’entrée dans une nouvelle époque », veut croire le député Aurélien Lopez-Liguori.
En constituant la plus grande délégation du Parlement, le RN forme également la délégation d’extrême droite la plus importante de l’histoire des institutions européennes, après les 25 députés du parti polonais Droit et Justice (PiS), membres des Conservateurs et Réformistes (CRE) en 2019.
« Nous nous préparons à un travail de construction avec les autres groupes [au Parlement européen] », confirme pour Euractiv Aurélien Lopez-Liguori, ancien collaborateur de l’eurodéputé sortant Jean-Lin Lacapelle.
De nouveaux équilibres au Parlement européen
Au Parlement européen, « l’alliance entre le PPE, Renew et les socialistes ne peut plus continuer », complète Aurélien Lopez-Liguori.
Avec ces résultats, le RN devrait s’assurer d’un poids conséquent dans les négociations à venir, en vue de la formation des alliances à la droite du Parlement. Le score du RN pourrait désenclaver le parti et son groupe, Identité et démocratie (ID), ostracisés durant le dernier mandat.
Depuis plusieurs mois, Marine Le Pen appelle à la formation d’un grand groupe des droites conservatrices, regroupant les membres d’ID et ceux des Conservateurs et Réformistes européens (CRE), menés par Fratelli d’Italia, le parti de la présidente du Conseil italien, Giorgia Meloni et par le PiS polonais.
Les deux groupes sont déjà d’accord sur plusieurs thèmes, notamment les politiques migratoire et climatique de l’Union européenne.
Sur ces deux points, plusieurs délégations des conservateurs du Parti populaire européen (PPE) pourraient aussi être tentées de se rapprocher de l’extrême droite.
Pour l’heure, Giorgia Meloni n’a pas encore dévoilé sa position sur les futures alliances possibles. Paradoxalement, le poids du RN pourrait être un atout comme un défaut, puisque difficilement absorbable dans un groupe commun d’extrême droite sans en prendre la tête, ce que d’autres formations pourraient refuser.
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