En provoquant une hausse des cours de l’énergie, des matières premières et des produits agricoles, la guerre en Ukraine conduit à un transfert de revenus au profit des pays exportateurs de ces produits. Elle influe donc sur le partage des revenus que ce soit pour les États, les ménages ou les entreprises. Tous les pays occidentaux ne sont pas dans la même situation. Etats-Unis et zone euro marquent leur différence.
Depuis 2018, les États-Unis dégagent un excédent extérieur pour l’énergie qui s’est amplifié depuis le début de la guerre en Ukraine. La hausse des prix de l’énergie ne provoque donc pas aux États-Unis de transfert au profit du reste du monde. Au contraire, ils bénéficient d’un apport de revenus.
Il n’en demeure pas moins que, depuis 2021, les ménages américains subissent une perte de pouvoir d’achat due dans un premier temps à la hausse du chômage, puis dans un deuxième temps à celle des prix. Les salaires n’ont augmenté que de 5 % en 2022 quand l’inflation a dépassé les 8 %. En revanche, avec l’augmentation du taux d’emploi, le revenu disponible brut s’est amélioré en 2022 sans retrouver la progression qu’il connaissait avant la crise sanitaire.
Une déformation du partage des revenus au détriment des salariés
De 2010 à 2021, les entreprises américaines ont bénéficié d’une hausse de leur taux de marge bénéficiaire. Cette évolution est imputable à une déformation du partage des revenus au détriment des salariés, aux aides publiques en forte progression depuis 2020 et à la forte hausse des profits des sociétés pétrolières et gazières. Ces derniers ont dépassé 250 milliards de dollars en 2022 contre une centaine durant la période 2011/2017.
L’État américain a-t-il accru le déficit public en augmentant ses dépenses sans relever à due concurrence les impôts ? Après être passé de 3 % du PIB à 14 % du PIB de 2019 à 2020, il est depuis revenu autour de 4 % du PIB. Les politiques de soutien de l’industrie, de la transition énergétique et les dépenses militaires expliquent le niveau élevé de ce déficit. Le partage des revenus s’effectue donc essentiellement au détriment des ménages et de l’État aux États-Unis.
Les entreprises européennes touchées par la hausse de leurs coûts
Depuis le début de la guerre en Ukraine, la zone euro subit un important prélèvement lié à l’augmentation du prix des importations d’énergie. Sa balance commerciale qui était structurellement excédentaire devient déficitaire. Un transfert de plusieurs points de PIB est ainsi réalisé au profit des pays exportateurs de pétrole et de gaz naturel. Les entreprises européennes sont touchées par la hausse de leurs coûts. Leur taux de marge bénéficiaire ne retrouve qu’à la fin de l’année 2022 son niveau de 2019.
Le niveau de la production reste pour de nombreux États inférieur à celui d’avant la crise sanitaire. C’est le cas, en particulier, pour la France. Les ménages de la zone euro subissent une contraction de leur pouvoir d’achat évaluée autour de 2 %. Les salaires augmentent moins vite que les prix, à un niveau comparable à celui des États-Unis, soit respectivement 4 et 8 %.
En zone euro, les États sont les plus affectés par la succession des crises.
Depuis 2020, les États compensent tout ou partie des effets de la crise sanitaire puis de la guerre en Ukraine en soutenant les ménages et les entreprises. Le déficit public est ainsi passé de 0,5 % à 7 % du PIB de 2019 à 2020 avant de revenir à 4 %. En zone euro, les États sont les plus affectés par la succession des crises. Les ménages subissent des pertes d’achat en partie compensées. Les entreprises sont également épaulées et arrivent à retrouver des taux de marges acceptables à la fin de 2022.
Les États-Unis sont dans une situation bien plus confortable que la zone euro grâce à leur indépendance énergétique et à la force du dollar. Les entreprises américaines investissent un à deux points de PIB de plus que celles de la zone euro, en particulier dans les domaines de la transition énergétique et du digital. La zone euro enregistre un déficit commercial avec une production industrielle pénalisée par l’augmentation des coûts. Le premier producteur de véhicules, l’Allemagne, est confronté à la concurrence des constructeurs chinois et américains qui ont opté pour la motorisation électrique.
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