En période de crises, de doutes, d’incertitudes, la tentation est au souverainisme économique et au protectionnisme. Avec le soutien plus ou moins explicite des populations, les pouvoirs publics entendent développer des filières nationales de production, créer des champions nationaux et restreindre les importations. L’épidémie de covid-19, la guerre en Ukraine et la transition énergétique donnent ainsi lieu à une surenchère de la part des grands États pour défendre le retour par la grande porte du patriotisme économique.
Malgré un surendettement, les États multiplient les aides pour favoriser l’installation sur leur territoire d’usines de microprocesseurs, de batteries, d’éoliennes ou de masques. La préférence nationale devient la règle dans la mise en œuvre des grands plans publics que ce soit aux États-Unis, en Europe ou en Chine, chacun s’accusant de pratiques protectionnistes au détriment de l’autre.
Les zélotes du nouveau nationalisme économique rêvent d’achever la mondialisation honnie
Dans le passé, ces vieilles lunes ont toujours échoué, amenant guerres et récessions. Des milliards d’euros ont été dépensés en vain pour bâtir de manière artificielle des filières ou pour sauver des secteurs d’activité. Du plan calcul aux plans textiles en passant par la sidérurgie, la France n’a pas été avare en la matière. Aujourd’hui, les zélotes du nouveau nationalisme économique rêvent d’achever la mondialisation honnie et accusée de tous les maux et notamment d’avoir provoqué la disparition de l’industrie européenne.
La mondialisation a pourtant permis d’importants gains de pouvoir d’achat au sein des pays occidentaux et aidé des milliards d’habitants à sortir de la pauvreté, ce qui en soi est un réel succès. Le déclin de l’industrie française est avant tout une affaire nationale ou européenne plus que mondiale. Les produits français ont été avant tout remplacés par ceux en provenance d’Allemagne, d’Italie ou de l’Espagne. La fermeture économique des frontières est synonyme de régression.
La réussite de la France dans le domaine de l’énergie nucléaire est le résultat d’une association avec les Américains de Westinghouse. Airbus, fruit d’une coopération européenne, est devenue le numéro un de l’industrie aéronautique mondiale grâce notamment à l’utilisation des réacteurs de General Electric. Son concurrent Boeing utilise, pour concevoir ses avions, les logiciels de Dassault Systèmes. Le groupe d’automobile Stellantis est devenu un des plus rentables au monde grâce aux ventes de ses filiales américaines.
L’économie mondiale souffre d’une insuffisance de concurrence
L’économie mondiale souffre non pas d’un excès mais d’une insuffisance de concurrence. La multiplication des positions de rente ralentit la diffusion du progrès technique et explique, en partie, le dangereux déclin de la productivité.
De plus en plus de secteurs sont oligopolistiques comme ceux de l’énergie, de l’automobile, de l’information et de la communication, de l’informatique, de la sidérurgie, de la grande distribution, etc.
Les consommateurs comme les salariés sont pris en otage par des grandes entreprises dont la taille, le poids, l’influence les placent au-dessus des États. Le débat sur les profits est l’illustration des positions de rente. Ils ne sont en rien l’expression du libéralisme en vertu duquel les bénéfices doivent, en effet, tendre vers zéro grâce à la concurrence.
Le meilleur remède pour lutter contre l’inflation, pour augmenter le pouvoir d’achat
La concurrence constitue le meilleur remède pour lutter contre l’inflation, pour augmenter le pouvoir d’achat des consommateurs, pour limiter les profits et pour améliorer la productivité. L’adoption d’un code de la concurrence mondiale avec une réaffirmation du rôle essentiel du commerce international comme facteur essentiel de développement constituerait un moyen de lutte contre les tentations souverainistes. Dans l’entre-deux guerres et dans les années 1960, les États-Unis avaient réussi à casser les oligopoles dans l’énergie et les communications avec l’adoption des lois antitrust. Cette politique doit être reprise et adaptée aux temps nouveaux.
Les États n’ont pas à se substituer aux producteurs, ils se doivent avant tout de permettre au marché de remplir au mieux son rôle et ses missions.
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