Elections consulaires : un nouveau report possible

Elections consulaires : un nouveau report possible

Le feuilleton des élections consulaires n’en finit pas…. Jean-Baptiste LEMOYNE, Secrétaire d’État chargé notamment des Français de l’étranger, a, pourtant, informé les conseillers des Français de l’étranger du nouveau calendrier électoral : les élections consulaires se tiendraient les samedi 29 et dimanche 30 mai 2021, tandis que les élections à l’AFE se dérouleraient les samedi 26 et dimanche 27 juin 2021.

La Covid-19 menace encore les élections des Français de l’étranger

En effet, dans les lois ayant mis en place le report des élections consulaires, une disposition a été glissée. 5 jours avant la publication du décret portant convocation des électeurs, la loi prévoit la remise d’un rapport au Parlement par le gouvernement, éclairé par l’avis du conseil scientifique, pour évaluer la situation sanitaire dans le monde et la possibilité de bel et bien organiser ces élections.

Il faudra donc attendre le mardi 23 février pour que la tenue des élections consulaires en mai 2021 soit confirmée. Pourtant des dispositions ont été prises mais seront-elles suffisantes ?

Robert del Picchia

Que se passerait-il en cas de confinements locaux qui interdiraient aux électeurs de se rendre au bureau de vote ? Le vote par Internet serait-il un palliatif suffisant ? Quid du vote par correspondance ? Le sénateur Robert del Picchia (LR), très actif auprès des élus consulaires, s’inquiète « devant tant d’incertitudes, ne serait-il pas préférable de repousser encore les échéances électorales ? »

Un report serait-il légal ?

Reporter encore les élections consulaires, c’est prolonger, une nouvelle fois, le mandat des élus de 2014. Et ce alors que la communauté française a cru de plus de 50% et que la diversité de celle-ci est toujours plus grande.

Au delà de la question de la représentativité des Conseillers des Français de l’étranger, c’est la question de la légalité de ce report qui se pose. En 2020, le principe constitutionnel du droit à la protection de la santé a prévalu sur le principe constitutionnel d’unité d’un scrutin à deux tours (les municipales 2020). Des circonstances moins dramatiques ont déjà permis deux reports consécutifs des mandats des conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger en 2011 et en 2013.

En tout état, si la situation sanitaire n’évolua pas de façon nette, le principe constitutionnel de droit à la protection de la santé constituerait sans nul doute un motif d’intérêt général qui conduirait le législateur à voter un second report des élections.

Et les sénateurs ?

S’agissant des élections sénatoriales, un nouveau report ne serait pas davantage censuré par le Conseil constitutionnel.

« le législateur organique a pu estimer que ce report devait également entraîner celui de l’élection des six sénateurs représentant les Français établis hors de France élus en septembre 2014 et qui devaient être renouvelés en septembre 2020, afin que ces sénateurs ne soient pas désignés par un collège en majeure partie composé d’élus exerçant leur mandat au-delà de son terme normal. »

Conseil constitutionnel – arrêt juillet 2020

Sur la base de son arrêt de juillet 2020 portant sur le report des élections de 6 sénateurs des Français de l’étranger qui devaient avoir lieu, comme pour leurs pairs de métropole, en septembre 2020, un nouveau décalage des élections locales des Français établis hors de France pourrait permettre de reporter le renouvellement partiel des sénateurs qui sont issus de ce collège électoral. Celui-ci serait même préférable au regard de la jurisprudence constitutionnelle et ce, alors même que les opérations pré-électorales et électorales ne posent pas les mêmes difficultés sanitaires que les élections locales (pour rappel les Grands électeurs (les conseillers consulaires et les délégués) sont, les seuls, appelés à voter).

Des élections oui mais quand ?

Un report des élections déjà reportées en 2021 serait ainsi constitutionnellement possible. Or, une telle décision ne peut être que d’une année pleine. En effet, l’ensemble des opérations électorales s’étale, à l’étranger, sur une période de 8 mois du fait des particularités.

2022 ? L’organisation de ces élections en 2022 serait plus qu’hasardeuse juridiquement, tant en raison du calendrier électoral déjà chargé avec les élections présidentielles et législatives que du risque accru de contentieux.

Car il y a deux autres écueils pour les élections locales des Français de l’étranger qui pourraient invalider une ou toutes les élections. L’écrasement des enjeux locaux par les campagnes nationales pourraient encore diminuer la participation. Si celle-ci est trop faible l’élection peut être annulée.

La densité des actions liées aux enjeux électoraux à laquelle serait soumis les consulats est aussi un risque majeur pour la validité des élections. Les difficultés rencontrées par l’administration peuvent, ainsi, entrainer l’invalidation des scrutins. En particulier avec le vote par correspondance qui a déjà, suite à des pertes de bulletin par les fonctionnaires consulaires, entraîné l’annulation d’une élection à New-York en 2010.

On peut citer d’autres actions imputables à l’administration consulaire ayant entrainé l’annulation de scrutins : non diffusion du matériel électoral d’un candidat au motif que des organisations contesteraient l’usage fait de leur logo ou de leur nom ou le soutien de leur part dont se prévaut le candidat ou la liste de candidats ; mauvaise information sur le mode de scrutin donnée le jour de celui-ci ; fermeture d’un bureau de vote pour assurer la sécurité des électeurs, en raison de troubles ayant éclaté la veille du scrutin, etc. Avec 3 élections en 2022, les risques d’une erreur humaine sont multipliés .

Le renouvellement de nos élus locaux et des sénateurs semblent s’éloigner. Un report en 2023 pour éviter un télescopage avec les élections nationales peut sembler préférable sur le papier mais entrainerai une prolongation de plus d’un tiers de la durée des mandats pour les élus concernés. Cela serait la première fois dans l’histoire de la Vème République, le record étant détenu pour l’instant par les élus régionaux qui ont eu en 2013 une prolongation de 21 mois de leurs mandats suite aux réformes instituant les grandes régions.

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