Droit du sol, pacte asile et migration : Jordan Bardella précise le volet « immigration » du RN

Droit du sol, pacte asile et migration : Jordan Bardella précise le volet « immigration » du RN

Le président du Rassemblement national (RN), Jordan Bardella, a confirmé lundi (24 juin) vouloir supprimer le droit du sol en France, après les élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet, mais n’est pas revenu sur son concept de « double frontière » ou sur le pacte européen sur l’asile et la migration.  

À quelques jours du premier tour des élections législatives, Jordan Bardella a dévoilé lundi matin à Paris le programme du RN, si le parti devait accéder au pouvoir au soir du 7 juillet. 

Parmi les priorités du mouvement d’extrême droite, figure – sans surprise – la question migratoire, déclarée « troisième grande urgence », après le pouvoir d’achat et la sécurité. Jordan Bardella souhaite notamment une meilleure « maitrise de l’immigration » et supprimer le droit du sol.  

Il y a encore quelques mois, le droit du sol permettait à n’importe quel enfant né en France, de parents étrangers, d’obtenir automatiquement la nationalité française à 18 ans, s’il résidait dans le pays au moment de sa majorité et s’il y avait vécu pendant au moins cinq ans depuis ses 11 ans.   

La loi immigration, adoptée en janvier 2024, a durci les conditions du droit du sol, en abrogeant son caractère automatique. Un enfant né en France, de parents étrangers, doit désormais engager une procédure entre ses 16 et 18 ans pour demander la nationalité française.  

Le président du RN souhaite aller encore plus loin, en supprimant totalement le droit du sol.   

« L’acquisition automatique de la nationalité française ne se justifie plus dans un monde à 8 milliards d’individus, et alors que se multiplient sur notre sol les preuves quotidiennes de notre incapacité à intégrer et à assimiler », a-t-il affirmé lundi.  

La « loi d’urgence » présentée dès l’été devrait supprimer ce droit, mais aussi créer un fonds pour remplacer l’aide médicale d’État (AME) par une Aide d’urgence vitale (AUV). 

Supprimer le droit du sol serait « redoutable » 

Au niveau juridique, supprimer le droit du sol pourrait s’avérer complexe, estime Smaïn Laacher, directeur de l’Observatoire du fait migratoire et de l’asile à la fondation Jean Jaurès. 

La loi d’urgence devrait passer devant le Conseil constitutionnel « ce qui ne sera pas une mince affaire », et, en cas de cohabitation, Emmanuel Macron aura encore « son mot à dire ». 

Selon lui, les véritables conséquences d’une telle mesure seraient plus à chercher sur la définition même de la nation française et sur l’unité du pays.  

« Je crains le pire pour les immigrés », explique-t-il à Euractiv. « Supprimer le droit du sol modifiera radicalement la place de l’immigration dans la société française, et le rapport de la société française à l’immigration ». 

Jordan Bardella souhaite que les personnes nées en France de parents étrangers fassent une demande nationalité française à leurs 18 ans, alors même qu’elles auront vécues dans l’Hexagone depuis leur naissance.  

L’immigration a été déclarée « troisième grande urgence » par Jordan Bardella [Mohammed Badra/EPA]

« Cela va opérer une série de discriminations et de problématiques en matière d’attachement à la nation française, et donc à la nationalité française », alerte encore Smain Laacher. « Beaucoup de gens pourraient se dire ‘la France nous a rejeté et bien on la rejette aussi’ ». 

D’après lui, imaginer que l’on va régler la question de l’immigration en France en supprimant le droit du sol est tout simplement impensable.   

Réserver Schengen « aux seuls ressortissants européens » 

Sur le volet migratoire, Jordan Bardella a indiqué vouloir refuser aux binationaux les postes à hautes responsabilités, expulser les délinquants et criminels étrangers et rétablir le délit de séjour irrégulier.  

« Ces mesures sont dangereuses pour les étrangers en France », estime Najat Vallaud-Belkacem, présidente de France Terre d’Asile, qui se dit « inquiète » de la montée de l’extrême droite.  

« Les mineurs non accompagnés et les demandeurs d’asile sont déjà l’objet d’une suspicion de principe, et les immigrés en situation irrégulière considérés comme des criminels ou des délinquants », souligne-t-elle dans un entretien avec Euractiv. 

Côté Europe, Jordan Bardella n’est pas directement revenu sur son idée de « double-frontière », qui devrait signifier la mise en place de contrôles aux frontières françaises.  

En revanche, le RN dit vouloir « ouvrir des négociations avec [ses] partenaires européens pour réserver la libre-circulation Schengen aux seuls ressortissants européens ».  

Une mesure qui irait à l’encontre du pacte asile et migration, adopté à Bruxelles le 14 mai dernier, et contre lequel les eurodéputés RN ont voté contre. Le RN a d’ailleurs annoncé début juin déposer un recours contre le pacte, au motif que l’UE outrepasserait ses compétences. 

Pour ce faire, le parti à la flamme fait appel à l’article 88-6 de la Constitution française, qui somme le gouvernement de saisir la Cour de justice de l’UE (CJUE), s’il obtient la signature de 60 députés à l’Assemblée nationale.  

Contactée par Euractiv, la CJUE déclare qu’aucune affaire relative à ce recours n’a été introduite à ce jour. 

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