Dette publique : la nouvelle proposition de la Commission sur les règles budgétaires européennes

Dette publique : la nouvelle proposition de la Commission sur les règles budgétaires européennes

La Commission européenne a présenté mercredi 9 novembre ses propositions de réforme sur les règles budgétaires européennes. La dette et les dépenses des gouvernements nationaux seront désormais gérées sous la forme de plans individuels pour chaque pays de l’UE, négociés entre les gouvernements nationaux et la Commission.

Les règles budgétaires de l’UE, qui déterminent la marge de manœuvre dont disposent les gouvernements nationaux en matière de dépenses publiques, ont fait l’objet de critiques ces dernières années. Si certains les décrivent comme inefficaces en raison d’un manque d’application, d’autres estiment qu’elles contraignent trop les États membres, notamment en ce qui concerne les investissements dans la transition écologique et numérique.

La Commission a maintenant présenté une proposition qui vise à répondre à ces deux préoccupations en donnant aux États membres plus de flexibilité dans la manière dont ils choisissent de réduire leur dette publique conformément aux objectifs fixés dans les traités de l’UE, tout en renforçant la mise en œuvre des trajectoires convenues.

« Avant tout, nous voulons assurer la viabilité de la dette publique. Cela nécessitera un ajustement budgétaire ainsi que des réformes et des investissements favorisant la croissance »

Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne chargé du Commerce

Au cœur de la proposition se trouve l’idée d’introduire des plans spécifiques à chaque pays, qui seraient négociés individuellement entre chaque gouvernement national et la Commission européenne.

Ceux-ci comprendront une trajectoire sur les « dépenses primaires nettes », c’est-à-dire les dépenses publiques sans les paiements d’intérêts ou les allocations de chômage. Ces dépenses prendront toutefois en compte les augmentations d’impôts discrétionnaires dans le cas où un gouvernement décide de financer des dépenses supplémentaires en augmentant les impôts.

« En fait, les pays s’approprieront leurs plans en étant directement impliqués dans leur conception, ce qui constitue un véritable changement par rapport à la situation actuelle », a indiqué M. Dombrovskis. Les États membres devraient ainsi combiner les efforts de réduction des niveaux d’endettement avec des investissements visant à renforcer la croissance économique, en fonction des situations nationales, a-t-il précisé.

Le vice-président exécutif de la Commission, Valdis Dombrovskis (à gauche), et le commissaire européen aux Affaires économiques, Paolo Gentiloni (à droite), lors d’une conférence de presse sur l’examen de la gouvernance économique. [EPA-EFE/OLIVIER HOSLET]

La règle des 1/20ème passe à la trappe

Si la Commission ne souhaite pas modifier les principaux objectifs en matière de finances publiques inscrits dans le droit communautaire, elle entend en revanche supprimer l’une des règles déterminant la manière d’atteindre ces objectifs — jugée dysfonctionnelle en raison d’énormes dépassements de la dette publique globale.

Comme par le passé, les États membres doivent s’efforcer d’atteindre un niveau d’endettement ne dépassant pas 60 % du PIB et un déficit annuel ne dépassant pas 3 % du PIB.

La règle qui invitait les États membres dépassant le seuil de 60 % à réduire chaque année leur dette publique de 1/20ème de la différence par rapport à l’objectif serait toutefois abandonnée au profit des nouveaux plans individuels, selon la communication de la Commission.

« Il ne s’agit pas de savoir s’il faut mettre la dette sur la voie de réduction vers 60 % du PIB. Il s’agit plutôt de savoir comment chaque pays y parvient, et surtout à quelle vitesse les États membres définissent leur trajectoire d’une manière plus réaliste que ne l’exige la règle actuelle des 1/20ème »

Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne chargé du Commerce

La proposition établit ainsi trois catégories de pays, essentiellement en fonction de leur ratio dette/PIB, mais aussi en tenant compte d’autres facteurs, tels que l’évolution prévue de la dette publique au cours des dix prochaines années.

Les plans seront négociés pour une période de quatre ans. Les pays très endettés devront montrer qu’ils peuvent commencer à réduire leur dette publique à partir de la fin de la période de quatre ans. Les pays de la catégorie moyenne disposeront en revanche de trois ans de plus pour y parvenir.

Les États membres doivent également démontrer qu’ils sont en mesure de réduire continuellement leur niveau d’endettement dans un délai de 10 ans, mais aucune date générale n’est fixée pour atteindre l’objectif de 60 %.

« Les pays confrontés à d’importants problèmes de dette publique devront toujours réduire leur dette plus rapidement que ceux dont la situation est moins préoccupante »

Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne chargé du Commerce

Toutefois, les États membres peuvent demander un délai supplémentaire et une « trajectoire d’ajustement plus progressive » que celle proposée par la Commission.

« Cela se ferait en échange de réformes structurelles et d’investissements supplémentaires pour stimuler la viabilité budgétaire et la croissance durable ». La prolongation serait subordonnée à l’approbation de la Commission européenne et du Conseil des États membres de l’UE, a précisé M. Dombrovskis.

Une application plus rigoureuse des règles

« Une fois l’accord conclu, chaque État membre doit se conformer à son plan pendant toute sa durée. Cela signifie une mise en œuvre complète », a-t-il ajouté, soulignant que le contrôle de l’application des règles sera renforcé par des mesures supplémentaires.

« Si nous constatons que le pays ne respecte pas ses engagements, nous pourrons demander un plan révisé avec des trajectoires budgétaires plus strictes et également imposer des sanctions financières », a-t-il poursuivi.

La Commission aura ainsi recours à des sanctions moins lourdes que par le passé, ce qui devrait lui permettre d’être plus réaliste lorsqu’elle les imposera effectivement. Les sanctions financières élevées ont l’inconvénient d’aggraver encore la situation financière des États membres auxquels elles sont appliquées.

« Si ces sanctions sont plus applicables, elles peuvent être plus clémentes. C’est un peu comme passer des armes nucléaires aux armes conventionnelles »

Paolo Gentiloni, le commissaire à l’Économie

Il a également déclaré qu’il espérait que les États membres seraient plus disposés à mettre en œuvre la trajectoire de réduction de la dette comme convenu, en raison de leur « plus grande appropriation » du processus.

La Commission, après avoir présenté ses projets de révision des règles, va maintenant discuter de ses idées avec les États membres et vise à présenter une proposition législative d’ici le premier trimestre de l’année prochaine, a déclaré M. Gentiloni.

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