C’est un équilibre délicat qui va devoir se construire entre les commissaires nommés pour traiter des dossiers du climat, de la concurrence et de l’énergie, par exemple entre l’Espagnole Teresa Ribera qui entend coupler la justice sociale à la défense de l’environnement et son collègue Wopke Hoekstra du Parti populaire européen (PPE).
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a proposé l’Espagnole Teresa Ribera (Socialistes et Démocrates européens/S&D) comme vice-présidente exécutive, en charge du portefeuille élargi du climat et de la concurrence.
Cette dernière sera secondée par le Néerlandais Wopke Hoekstra (Parti populaire européen/PPE) au climat et par le Danois Dan Jørgensen (S&D) à l’énergie.
« Nous voulons construire une économie décarbonée et circulaire compétitive, avec une transition équitable pour tous », a expliqué Ursula von der Leyen à Strasbourg mardi 17 septembre.
Teresa Ribera sera en charge du portefeuille de la concurrence et « guidera le travail pour s’assurer que l’Europe reste sur la bonne voie afin d’atteindre les objectifs fixés dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe [Green Deal] ».
Wopke Hoekstra supervisera la « mise en œuvre » des mesures prises ces cinq dernières années pour lutter contre le changement climatique et s’occupera de la diplomatie climatique et de la fiscalité, a-t-elle précisé.
Dan Jørgensen, quant à lui, « contribuera à faire baisser les prix de l’énergie, à investir dans les énergies propres et à s’assurer que nous réduisons nos dépendances », a encore souligné Ursula von der Leyen. Il sera également « le tout premier commissaire au logement ».
Un mélange d’idéalisme et de pragmatisme
Le Parti populaire européen (PPE) de centre droit, qui a fait campagne contre des politiques comme la loi sur la restauration de la nature et l’interdiction des voitures à essence et diesel d’ici 2035, est fortement représenté au sein du nouveau Collège des commissaires.
Ses membres devraient donc servir d’amortisseurs aux ambition sociales de la gauche. Lors d’un entretien accordé à Euractiv en avril 2024, Teresa Ribera avait en effet étroitement lié l’action climatique à la justice sociale.
Pourtant, avec un commissaire néerlandais de centre droit chargé de la décarbonation, l’UE devrait se concentrer sur ses ambitions climatiques, mais sans forcément les lier à une révolution sociale.
« Une bonne coordination et une bonne coopération sont primordiales », a souligné la présidente de la Commission, afin d’éviter que les compétences des uns et des autres se chevauchent.
Certains députés ont pourtant été très clairs. « Wopke Hoekstra et [la candidate suédoise à l’environnement] Jessika Roswall représentent une réorientation intelligente de la politique climatique et environnementale » de l’UE, explique Peter Liese, un eurodéputé allemand représentant le PPE au sein de la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire (ENVI).
« Nous avons besoin de clarté sur la manière dont les nouveaux portefeuilles qui traitent du changement climatique et de la décarbonation fonctionneront en pratique », ajoute Bas Eickhout, des Verts, qui avait cherché à empêcher la nomination de Wopke Hoekstra en 2023.
Le Parlement européen se prépare à des auditions difficiles, qui auront lieu entre le 4 et le 8 novembre.
Dan Jørgensen au milieu ?
Dan Jørgensen, le potentiel commissaire à l’Énergie et au Logement, pourrait se retrouver en position de modérateur entre l’Espagnole et le Néerlandais. Très ambitieux en matière de climat, ce dernier est cependant considéré comme quelqu’un de pragmatique.
Dan Jørgensen est connu à Bruxelles pour avoir été membre de la commission ENVI du Parlement européen de 2004 à 2013, avant de devenir ministre de l’Énergie, puis de la Politique climatique, au Danemark.
L’homme entretient également de bonnes relations dans les capitales européennes. La plupart des ministres actuels et leurs collaborateurs le connaissent pour avoir participé à des réunions ministérielles et à des rencontres internationales lorsqu’il était ministre du Climat et membre de l’équipe de l’UE lors des négociations sur le climat de la COP28 à Dubaï.
Stéphane Séjourné comme joker
Reste à savoir quel rôle Stéphane Séjourné jouera dans cette dynamique.
Le Français s’est vu attribuer un poste de vice-président exécutif, et il est responsable de la prospérité et de la stratégie industrielle.
Avec une nouvelle stratégie industrielle propre attendue dans les 100 premiers jours de la prochaine Commission, Stéphane Séjourné pourrait avoir une influence décisive sur le soutien qui sera apporté aux pompes à chaleur renouvelables ainsi qu’à d’autres industries en Europe.
Bien que Stéphane Séjourné ait une expérience limitée en matière de politique industrielle ou de compétitivité, il a défendu en tant que dirigeant de Renew les réformes du Green Deal, y compris le règlement pour une industrie « zéro net » (Net Zero Industry Act, NZIA).
Son prédécesseur, Thierry Breton, avait supervisé la création de la NZIA, mais celle-ci n’a pas bénéficié d’un financement supplémentaire significatif. Les principaux instruments de financement existants, comme la Banque européenne de l’hydrogène, sont restés du ressort des services climatiques de la Commission plutôt que de l’équipe du marché intérieur de Thierry Breton.
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