C’est un acte sans précédent sous la Ve République que les députés ont accompli, mardi 12 novembre, en fin d’après-midi. Les élus du Palais-Bourbon ont rejeté la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour l’année 2025. Ce vote négatif provoque le rejet de l’ensemble du budget de l’État examiné en première lecture à l’Assemblée nationale. La seconde partie, consacrée aux dépenses, ne sera donc pas discutée par les députés, pour la troisième année de suite.
Les députés n’examineront pas le volet dépenses
Une première étape de la bataille budgétaire s’est achevée à l’Assemblée nationale, ce mardi 12 novembre. Les députés ont en effet rejeté, par 362 voix contre 192, la partie « recettes » du projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Conséquence immédiate : l’ensemble du texte, considéré comme rejeté, est directement transmis au Sénat. Sans que la partie « dépenses » ne soit examinée dans l’hémicycle du Palais-Bourbon.
Dans la nuit du vendredi 8 à samedi 9 novembre, le ministre avait déjà fustigé les modifications adoptées lors de l’examen du PLF 2025, créant des recettes pour la plupart « contraires aux traités européens, aux conventions fiscales signées par la France« , ou encore « totalement inconstitutionnelles« . « Il y a beaucoup trop d’impôts« , avait déploré Laurent Saint-Martin, pointant l’ajout de près de 35 milliards d’euros de recettes supplémentaires par rapport au projet initial.
Les membres du « socle commun » ont successivement critiqué le texte, David Amiel (Ensemble pour la République) dénonçant un « barbouillis budgétaire qui n’a ni queue ni tête« , Jean-Paul Matteï (Les Démocrates) évoquant un texte qui « n’est plus assis sur la réalité« , ou encore Félicie Gérard (Horizons) critiquant un budget qui « abandonne toute logique de responsabilité financière« . « La version du texte issue de nos débats est totalement dénaturée et ne correspond en rien à la proposition initiale souhaitée par Michel Barnier » a, quant à elle, regretté Véronique Louwagie (Droite républicaine).
Un budget façonné par la gauche
Dans une Assemblée nationale sans véritable majorité, la partie « recettes » du projet de loi de finances, largement amendée dans le sens souhaité par la gauche, a en revanche reçu le soutien des quatre groupes du NFP. « Ce budget est celui du Nouveau Front populaire« , est allé jusqu’à estimer Aurélien Le Coq (La France insoumise) en raison des inflexions majeures apportées dans l’hémicycle, avant de déclarer la « Macronie » définitivement « morte« .
Si le Rassemblement national est parvenu, lui aussi, à faire adopter un certain nombre d’amendements, il n’a cependant pas validé la copie issue de la première lecture du texte à l’Assemblée nationale. « Vous avez alourdi la barque jusqu’à l’absurde, de sorte que nous ne pouvons évidemment pas voter cette première partie du budget, qui mènerait notre pays au chaos« , a fustigé Matthias Renault, accusant les députés du Nouveau Front populaire d’ »étouffement fiscal« . Il a, par ailleurs, reproché aux élus du « socle commun » de Michel Barnier d’avoir « déserté le budget » et « laissé la gauche [le] saboter« .
Direction 49.3 ?
Parmi les mesures qui vont probablement disparaître, l’augmentation de la fiscalité liée au patrimoine des milliardaires et la hausse des impôts sur les superprofits, autant de mesures votées par la gauche qui a profité de la déperdition des troupes LR et macronistes.
Michel Barnier devrait aussi profiter de l’occasion pour réintroduire plusieurs dispositions qu’il avait défendues, mais qui avaient été finalement retoquées par ses propres troupes, à l’instar de la hausse de la taxe sur l’électricité, l’alourdissement du malus automobile et la surtaxe sur les grandes entreprises.
C’est désormais au Sénat d’amender le texte mais le Premier ministre pourrait en effet être tenté de balayer d’un revers de la main les pistes d’économies votées par les sénateurs. En cas d’activation très probable de l’article 49.3 de la Constitution au retour du Budget à l’Assemblée dans quelques semaines, Michel Barnier pourra retenir les modifications du Sénat qu’il souhaite et en écarter d’autres.
Certains dans les rangs de Renaissance, à l’instar du député Charles Rodwell, menacent déjà de ne pas parvenir à unaccord en cas de hausse des cotisations patronales votée par le Sénat.
Autant dire que la chambre haute qui n’a de cesse ces derniers mois de jouer la carte de la responsabilité face à l’Assemblée va devoir jouer finalement sa partition.
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