Bart De Wever est nommé Premier ministre belge et plonge illico « dans le grand bain » de l’UE

Bart De Wever est nommé Premier ministre belge et plonge illico « dans le grand bain » de l’UE

Le chef des conservateurs flamands, Bart De Wever, est devenu lundi le nouveau Premier ministre belge avant de participer dans la foulée à son premier Conseil européen, la réunion des dirigeants l’Union européenne (UE) que la Belgique va faire pencher un peu plus à droite.

L’ancien maire d’Anvers, qui a prêté serment ce lundi matin devant le roi Philippe avec ses 14 ministres — dont dix hommes et seulement quatre femmes —, est le premier indépendantiste flamand à prendre la tête du gouvernement fédéral en Belgique.

Près de huit mois après les élections législatives, marquées par la victoire de sa formation, l’Alliance néo-flamande (N-VA) en Flandre, il va ancrer le pays davantage à droite avec ses quatre partenaires de coalition, dont le Mouvement réformateur (MR), parti libéral-conservateur francophone qui est devenu la première force politique en Wallonie en détrônant le Parti socialiste.

Outre la N-VA, la coalition réunit les chrétiens-démocrates (CD&V) et les socialistes flamands (Vooruit), ainsi que deux formations francophones, les conservateurs du MR, et les Engagés, parti centriste libéral, héritier des chrétiens-démocrates. Les cinq partis représentent 81 des 150 députés de la nouvelle Chambre élue le 9 juin.

Pas de Vlaams Belang

Fait notable, la nouvelle coalition ne comprend pas le Vlaams Belang, parti nationaliste flamand qui appelle à la sécession de la région flamande du reste de la Belgique.

Côté casting, son équipe ignore le principe de la parité, avec une forte majorité d’hommes. Le Conseil des ministres resteiont (Kern), le « noyau » du gouvernement, s’annonce même sans aucune femme.

« C’est dommage », a regretté Bart De Wever, en rappelant que la désignation des ministres était la responsabilité des chefs des partis de la coalition.

Le nouvel attelage succède à celui du libéral Alexander De Croo en place depuis octobre 2020. Il signe le retour au pouvoir de la N-VA, déjà associée à un gouvernement de centre droit entre 2014 et 2018. Deux « anciens » de cette période, Jan Jambon et Theo Francken, prennent respectivement les portefeuilles des Finances et de la Défense.

On retrouve également certains ministres du gouvernement sortant, le socialiste flamand Frank Vandenbroucke conserve la Santé, tandis qu’Annelies Verlinden (CD&V) passe à la Justice en laissant l’Intérieur au conservateur francophone Bernard Quintin. Le centriste francophone Maxime Prévot, chef de file des Engagés, a été désigné chef de la diplomatie.

Surmonter les barrières politiques et linguistiques

Divisée entre les communautés francophone et néerlandophone et dotée d’un système politique très complexe, la Belgique a un record peu enviable de négociations de coalition douloureusement prolongées, qui ont atteint un record de 541 jours entre 2010 et 2011.

La constitution belge stipule que le Conseil des ministres, l’organe exécutif du gouvernement, doit compter un nombre égal de ministres francophones et néerlandophones, ce qui oblige les partis à forger une coalition entre les régions du nord et du sud de la Belgique.

Début janvier, le roi Philippe, chef de l’État belge, a lancé un ultimatum à Bart De Wever pour qu’il fasse avancer les négociations dans l’impasse. Soit ce dernier parvenait à un accord avant la fin du mois de janvier, soit le pays se rendrait de nouveau aux urnes.

Bart De Wever avait menacé de jeter l’éponge si aucun accord n’était trouvé vendredi — mais celui-ci a finalement été trouvé à quelques heures de l’échéance.

Les négociateurs ont eu besoin d’une dernière session marathon de 60 heures pour aplanir les divergences sur leur programme de 800 pages — un compromis rendu compliqué par l’effort budgétaire et les importantes réformes socio-économiques à mener pour assainir les finances publiques.

La nouvelle coalition, baptisée « Arizona » d’après les couleurs du drapeau de l’État américain qui correspondent à celles des partis le composant, comble les fossés politiques et linguistiques.

« Au boulot ! »

Sur le plan de la Défense européenne, qui sera discutée au Conseil de ce lundi, Bart De Wever a assuré que la Belgique comptait bien respecter le seuil des 2 % du PIB dédiés au budget défense (contre 1,3 % actuellement), un objectif fixé de longue date pour tous les pays membres de l’OTAN.

Avec un déficit public attendu pour 2024 à 4,6 % du PIB, la Belgique est un des pires élèves de l’UE, et le gouvernement De Wever compte dégager 20 milliards d’euros pour rentrer progressivement dans les clous européens… en limitant les dépenses publiques dans de nombreux secteurs tout en relevant le budget de défense.

« L’Europe a été un peu paresseuse sur le sujet de la Défense, [Vladimir] Poutine nous a réveillés », a déclaré le Belge à son arrivée à cette réunion. Mais il a souligné qu’il était fondamentalement « atlantiste » et soucieux de « continuer l’alliance avec les États-Unis » à l’ère Trump.

Au plan national, le nouveau gouvernement belge entend durcir la politique de l’asile et les conditions d’obtention des aides sociales pour les exilés, renforcer la sécurité et la lutte contre le narcotrafic. Sur le plan socio-économique, il compte notamment limiter à deux ans le droit aux allocations chômage.

L’arrivée de Bart De Wever au « 16 rue de la loi » — le Downing Street de Bruxelles — lui a valu les félicitations d’Ursula von der Leyen. La présidente de la Commission européenne a souhaité « une coopération étroite sur compétitivité, migration et sécurité », les grandes priorités de l’UE.

Dès samedi, l’eurodéputée française Marion Maréchal, alliée d’Eric Zemmour, avait elle aussi félicité le dirigeant belge sur X.

La nièce de Marine Le Pen a relevé que les partis européens associés dans le groupe des Conservateurs et Réformistes européens d’extrême droite au Parlement de Strasbourg comptaient désormais « trois Premiers ministres à la table du Conseil européen », avec l’Italienne Giorgia Meloni et le Tchèque Pietr Fiala. La N-VA de Bart De Wever compte trois élus dans l’hémicycle européen.

Lundi matin, Bart De Wever a comparé à un plongeon « dans le grand bain » sa participation à une réunion de dirigeants européens. Il a dit déjà connaître Giorgia Meloni, mais va découvrir la plupart de ses homologues. « Et maintenant, au boulot ! », a-t-il écrit sur les réseaux sociaux.

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