Au lendemain de sa victoire électorale, Friedrich Merz se hâte de trouver un accord de coalition

Au lendemain de sa victoire électorale, Friedrich Merz se hâte de trouver un accord de coalition

BERLIN — Tout juste sorti victorieux des élections, Friedrich Merz n’a pas tardé, lundi, à former les contours d’un gouvernement avec les sociaux-démocrates. Le conservateur de la CDU pourrait débloquer de nouvelles dépenses en matière de sécurité avant même la conclusion officielle d’une nouvelle coalition.

Dimanche, l’Union chrétienne-démocrate (CDU) de Friedrich Merz a remporté les élections législatives allemandes avec une large avance. Mais après la célébration de la victoire, vient maintenant le moment de trouver un partenaire de coalition.

Comme prévu, la tête de liste du parti s’est rapidement tournée vers le Parti social-démocrate (SPD) du chancelier sortant, Olaf Scholz, en tant que partenaire privilégié.

« Nous allons à présent mener des discussions [avec le SPD] au cours des prochains jours », a expliqué Friedrich Merz au siège de la CDU à Berlin lundi, citant comme sujets prioritaires la politique étrangère et de sécurité, la gestion de l’immigration et la relance de l’industrie allemande.

« Une transition harmonieuse »

Le chrétien-démocrate devait s’entretenir le même jour avec Lars Klingbeil, le codirigeant du SPD, et a ajouté qu’il échangerait également avec Olaf Scholz pour assurer une transition harmonieuse.

Lars Klingbeil, qui est selon certains, la nouvelle figure de proue du parti depuis l’annonce du départ imminent d’Olaf Scholz, s’est montré peu communicatif lundi, affirmant qu’il n’était pas certain que le SPD rejoigne une coalition. Mais il a aussi ajouté que « nous [le SPD] sommes prêts à entamer des discussions ».

Le résultat des élections laisse peu d’autres options pour un gouvernement stable, le centre ayant perdu en influence lors du scrutin de dimanche.

En effet, la part des sièges des partis de centre gauche et de centre droit a chuté d’un tiers par rapport aux dernières élections de 2021. Une coalition des Verts et de la CDU n’atteint pas la majorité. Tandis que les libéraux du FDP ne sont pas parvenus à réintégrer le Bundestag.

Le bloc de centre droit pourrait disposer de la majorité parlementaire avec le parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD), mais Friedrich Merz a de nouveau exclu dimanche toute coopération formelle.

En tout état de cause, la défaite des partis du centre créé un véritable casse-tête pour Friedrich Merz alors qu’il a promis, dimanche soir, de renforcer la défense de l’Allemagne et d’aider à rendre l’Europe indépendante de la protection des États-Unis et de Donald Trump.

L’investissement nécessaire s’annonce toutefois difficile à financer dans le cadre des règles constitutionnelles strictes de l’Allemagne en matière de dette.

Selon l’Institut Ifo de Munich, il faudrait 95 milliards d’euros par an à partir de 2028 pour atteindre l’objectif de dépenses de 2 % fixé par l’OTAN. Soit près du double du budget actuel de la défense. Pour atteindre l’objectif potentiel de 3 %, il faudrait 140 milliards d’euros.

Mais pour modifier la Constitution, une majorité des deux tiers est nécessaire au parlement allemand, ce que les partis centristes CDU/CSU, SPD et Verts viennent d’échouer de justesse à obtenir.

Changement des règles

Alors que le temps presse, Berlin s’est précipitée lundi pour éviter de lier les mains du nouveau gouvernement avant sa prise de fonction. Ce qui pourrait entraîner une décision rare et controversée.

Friedrich Merz, tête de liste de la CDU et vainqueur des élections allemandes. [Christoph Soeder/picture alliance via Getty Images
Friedrich Merz, tête de liste de la CDU et vainqueur des élections allemandes. [Christoph Soeder/picture alliance via Getty Images

Les Verts ont suggéré de convoquer une réunion du Bundestag dans les 30 prochains jours — alors que le parlement est officiellement toujours en session dans les limites de sa composition précédente — afin de permettre de nouvelles dépenses d’investissement en matière de dette et de défense. Friedrich Merz et Olaf Scholz ont tous deux indiqué qu’ils étaient ouverts à cette approche.

L’une des options consisterait à accepter de réformer le « frein à l’endettement », une limite constitutionnelle du déficit, qui augmenterait la marge de manœuvre budgétaire, y compris pour la défense.

Le frein à l’endettement, introduit en 2009, limite les déficits publics structurels à 0,35 % du PIB, mais a récemment été critiqué pour avoir freiné les investissements dans les infrastructures et la défense de l’Allemagne.

Une autre solution serait que le gouvernement crée un fonds spécial extrabudgétaire en dehors des limites du frein à l’endettement, qui pourrait être adopté à la majorité des deux tiers. Un tel fonds spécial de 100 milliards d’euros a déjà été créé après l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie en 2022, mais il sera épuisé d’ici à 2027.

Mettre fin à l’État de crise en Allemagne

Officiellement, la CDU souhaite maintenir le frein à l’endettement. Mais Friedrich Merz a fait part de son ouverture à une réforme pendant sa campagne électorale.

Le SPD, quant à lui, est favorable à la réforme, ayant précédemment fait valoir que l’augmentation des dépenses de défense ne devrait pas se faire au détriment des retraités, de l’État-providence ou d’autres investissements publics.

Markus Söder, le chef du parti frère bavarois de la CDU, l’Union chrétienne-sociale (CSU) — active en Bavière —, a notamment repris ces arguments lundi, déclarant : « Il ne sera pas possible d’organiser notre défense en réduisant tout simplement tout » et en provoquant des « tensions sociales ».

Friedrich Merz pourrait également opter pour des négociations difficiles avec Die Linke au sein du nouveau parlement. Le parti d’extrême gauche a laissé la porte ouverte à une réforme conjointe du frein à l’endettement, mais s’oppose à une augmentation des dépenses de défense.

Toutefois, compte tenu de l’urgence de la situation et de la pression exercée sur le centre, les anciennes règles peuvent rapidement évoluer.

Le responsable chrétien-démocrate a rappelé sa priorité était de mettre fin à l’état de crise en Allemagne et de regagner la confiance des citoyens après une période difficile de trois ans.

« Certains d’entre vous partageront l’avis que ce mandat pourrait être l’une des dernières chances d’y parvenir », a-t-il souligné.

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