L’économie allemande est à la peine depuis la fin de l’épidémie de Covid et, surtout, depuis le début de la guerre en Ukraine. Son PIB a diminué au deuxième trimestre, alors que celui de l’ensemble de la zone euro a progressé de 0,3 point.
Plusieurs facteurs expliquent les mauvais résultats de la première puissance économique de la zone euro : stagnation du commerce international, faibles niveaux de consommation et d’investissement, et politiques budgétaires restrictives.
Panne de croissance et faiblesse du commerce international
De 2010 à 2020, la croissance allemande était légèrement supérieure à la moyenne de la zone euro. Depuis 2021, ce n’est plus le cas : elle est constamment plus faible. La production manufacturière, longtemps la force de l’Allemagne, connaît une forte baisse. Elle a diminué de 15 % entre 2019 et 2024, contre moins de 5 % pour celle de la zone euro. L’industrie allemande a été pénalisée par la hausse des prix de l’énergie et des matières premières, ainsi que par les pénuries de biens intermédiaires. Les secteurs fortement consommateurs d’énergie, comme la sidérurgie, la chimie ou l’automobile, ont réduit leur production de manière significative en 2022 et en 2023.
L’économie allemande dépend fortement des exportations qui représentent 45 % de son PIB, contre 32 % pour la France. Cette dépendance s’est accrue pour l’Allemagne au cours des quinze dernières années, la part des exportations dans le PIB ayant progressé de 10 points, contre 6 points pour la France. Depuis 2018, les exportations allemandes stagnent. Elles sont même en recul vers la Chine et l’Union européenne.
Plusieurs facteurs expliquent cette rupture qui met à mal le modèle de croissance de l’Allemagne. À l’exception de la période Covid, la demande en biens industriels progresse moins vite que les services. Le positionnement de l’industrie allemande n’apparaît plus optimal. Les entreprises allemandes sont principalement présentes dans les secteurs de l’automobile, de la chimie, des biens d’équipement et des biens intermédiaires. Ces secteurs subissent de plus en plus la concurrence chinoise.
L’industrie automobile allemande doit faire face à la montée en puissance des constructeurs chinois de véhicules électriques. Entre 2019 et 2023, la production dans l’industrie automobile et les biens d’équipement a enregistré des baisses de 10 à 15 %. Seule l’industrie des biens de transport hors automobiles progresse de plus de 20 %, grâce aux ventes d’avions. La baisse des exportations s’explique également par le ralentissement de la croissance en Chine et en Europe. La montée du protectionnisme pèse également sur les échanges.
Faible investissement des entreprises, faible consommation des ménages
Le mauvais positionnement sur le marché et le recul de la rentabilité des entreprises sont à la fois la cause et la conséquence de la faiblesse de l’investissement. Depuis 2016, le taux d’investissement des entreprises allemandes est en moyenne inférieur de deux points à celui de la zone euro. Ce déficit d’investissement sera préjudiciable pour la croissance des prochaines années. Les entreprises allemandes préfèrent investir à l’étranger, ce qui nuit à la croissance du pays.
Depuis 2022, la consommation des ménages allemands stagne. Ces derniers préfèrent épargner. Les augmentations de salaires, qui sont plus élevées que dans la zone euro, ne sont pas affectées aux dépenses courantes ou à l’investissement. Le taux d’épargne des ménages allemands dépasse 21 % du revenu disponible brut, soit deux points de plus qu’avant la crise sanitaire. Ce phénomène est également observé en France. Le taux d’épargne des Allemands est désormais supérieur de plus de 6 points à celui de la zone euro.
Des politiques budgétaires restrictives, un modèle de croissance à réinventer
La coalition SPD, FDP et Verts, bien que divisée sur le plan économique, maintient malgré tout une politique budgétaire restrictive. Le déficit public a été ramené à 2 % du PIB en 2023. Pourtant, l’Allemagne a un besoin important de modernisation de ses infrastructures. Le taux d’investissement public demeure faible, autour de 2,7 % du PIB, contre 3,3 % en moyenne au sein de la zone euro. Ce choix nuit à la croissance actuelle et pourrait peser sur celle des prochaines années.
La sortie de crise pour l’Allemagne suppose une mutation de son modèle de croissance. Les entreprises allemandes doivent se repositionner pour tenir compte des impératifs de la transition écologique. Elles doivent monter encore en gamme pour échapper à la concurrence directe de leurs homologues chinoises. Pour ce faire, elles devront consentir à un effort accru d’investissement.
Il en va de même pour les pouvoirs publics qui auraient tout intérêt à dénouer les cordons de la bourse pour moderniser les infrastructures du pays. Pour relever les défis auxquels l’Allemagne est confrontée, ses entreprises peuvent compter sur une rentabilité encore correcte et sur le niveau élevé de formation de leurs salariés.
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