En ce début d’automne, la hausse des impôts en France est une petite musique de nuit qui revient de plus en souvent, Elle s’installe comme une amère fatalité. Certains estiment qu’il est temps de recourir à une augmentation des impôts au nom d’un juste partage des charges ; d’autres considèrent qu’elle est incontournable pour limiter voire réduire la dérive du déficit public et que toute autre solution est vaine.
Nul ne peut ignorer que la France figure parmi le trio de tête des pays européens en matière de prélèvements obligatoires. Ces derniers ont comme corollaire un niveau élevé de dépenses publiques, autour de 56 % du PIB. Nul ne peut ignorer que l’acceptabilité des augmentations d’impôts est de plus en plus problématique, comme l’ont prouvé, ces dernières années, les mouvements des bonnets rouges ou des gilets jaunes. Pour éviter cet écueil, l’idée serait de taxer les ménages les plus riches.
Combien de riches ?
Ces derniers ont l’avantage de ne pas être très nombreux, permettant ainsi de ne pas mécontenter la grande majorité des contribuables. Mais cet avantage est aussi un inconvénient : leur faible nombre limite les gains à espérer. Les 10 % les plus aisés sont les ménages dont les revenus sont supérieurs à 4 500/5 000 euros par mois. Pour une personne au SMIC, ces ménages paraissent sans nul doute riches, mais il n’est guère envisageable d’augmenter leurs prélèvements de 20 ou 30 %, sachant qu’ils acquittent déjà à eux seuls 70 % de l’impôt sur le revenu.
L’idée serait alors de s’attaquer aux très riches, soit les 0,1 % des contribuables les plus aisés. Ils sont environ 30 000 et gagnent, en moyenne, 600 000 euros par an. Parmi ces contribuables, les plus aisés peuvent s’expatrier ou optimiser leur situation fiscale. Sur le papier, les gains ne sont pas toujours tangibles. La taxation des riches ou des ultrariches est une boîte à fantasmes et à contrevérités.
Revenus et patrimoine
Bien souvent, revenus et patrimoines sont confondus. L’augmentation de la valorisation d’un actif est prise pour un enrichissement et assimilé à un flux taxable, alors qu’il s’agit d’une valeur de marché à un moment donné. Tant que le détenteur des actions n’a pas vendu, il n’a rien gagné ou perdu. Les tenants d’une augmentation des impôts sur les plus riches soulignent que ces derniers parviennent à des taux moyens d’imposition inférieurs à ceux de contribuables plus modestes. Par le jeu des dispositifs dérogatoires – abattements – crédits – réductions d’impôt – ils atténuent la progressivité de l’impôt. Rien d’illégal à cela, ces contribuables jonglent avec les possibilités ouvertes par le législateur.
Un bon impôt : assiette large, taux modestes
Au nom de l’efficacité et de la transparence, un bon impôt s’est toujours caractérisé par une assiette large et des taux modestes. Un bon impôt est également celui qui est en adéquation avec les capacités financières des redevables. Plus il est neutre sur le plan économique, plus il a des chances d’être le moins mal accepté par les contribuables.
L’introduction du prélèvement forfaitaire unique en 2018 sur les revenus financiers avec son taux de 12,8 % auquel s’ajoutent 17,2 % de prélèvements sociaux obéit à cette logique. Malgré un abaissement des taux par rapport au régime fiscal précédent – l’imposition au barème de l’impôt sur les revenus – les recettes fiscales ont, pour l’Etat, augmenté.
Depuis la création de la CSG en 1991, la France n’a pas connu de grandes réformes fiscales. Les gouvernements ont opéré des ajustements au fil de l’eau, supprimant certains impôts impopulaires ou obsolètes comme la taxe d’habitation pour les résidences principales ou la redevance audiovisuelle, sans les remplacer. La fiscalité locale est en jachère.
La fiscalité doit épouser le temps économique.
De leur côté, le système de cotisations sociales est mité par les exonérations de charges instituées il y a plus de vingt ans au moment du passage du temps de travail à 35 heures. Par les effets de seuil et de chappe, le système d’abattements sur les bas salaires ne favorise pas les augmentations de ces derniers et la montée en compétences. Il nivelle au lieu d’élever avec comme conséquence une attrition des recettes publiques.
La fiscalité doit épouser le temps économique. Au XIIIe siècle, le roi Louis IX institua la gabelle, l’impôt sur le sel, car ce dernier était indispensable pour conserver les aliments. En 1798, dans une France où le nombre de propriétaires augmentait, l’impôt sur les portes et fenêtres fut créé. En 1914, ce fut le tour de l’impôt sur le revenu, symbole de la montée en puissance du salariat et des besoins croissants de l’État. En 1954, avec l’essor de la société de consommation, la TVA fut introduite en France. Aujourd’hui, les impôts se doivent d’être en phase avec une économie mondialisée, tertiarisée et digitalisée, ce qui ne doit pas de toute façon empêcher la recherche d’une plus grande efficience dans la gestion publique.
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