Ce lundi 24 octobre, le gouvernement d’Elisabeth Borne a été confronté à 3 motions de censure, une de plus depuis sa prise de fonction. Toutes les 3, comme les précédentes, ont échoué mais pour combien de temps ? Devrons-nous retourner voter ? Pour les Français de l’étranger, on fait un point sur notre constitution !
L’article 49.3
L’alinéa 3 de l’article 49 permet au premier ministre, « après délibération du conseil des ministres », d’« engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale » sur le vote de certains textes.
Depuis la révision constitutionnelle de 2008, l’usage du 49.3 est limité à un seul texte de loi par session parlementaire, à l’exception des projets de loi de finance (PLF) et de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), pour lesquels le gouvernement peut y recourir sans limitation.
La motion de censure
Une motion de censure est un texte, qui, s’il est voté par une majorité de députés, entraîne la démission du gouvernement. « Une telle motion n’est recevable que si elle est signée par un dixième au moins des membres de l’Assemblée nationale. Le vote ne peut avoir lieu que quarante-huit heures après son dépôt », indique la Constitution dans l’article 49.2. Lorsque l’article 49.3 est utilisé, pour faire passer un texte sans vote, la motion de censure reste le seul moyen pour les députés de s’opposer au texte.
Pour être adoptée, une motion de censure doit réunir au moins 289 voix de députés (la majorité absolue). En effet, seuls les votes « pour » sont comptabilisés, ce qui signifie qu’une abstention n’a pas d’effet.
Après les élections législatives de 2022, l’Assemblée se retrouve morcelée en plusieurs groupes, sans qu’aucun n’atteigne la majorité. Une motion de censure a donc besoin de l’union de plusieurs groupes. Puisqu’on peut exclure le groupe Renaissance (170 députés), MoDem (51 députés) et Horizons (30 députés) qui font partie de la majorité, il ne reste donc potentiellement que 326 députés d’opposition.
Pour atteindre au moins 289 voix, il faut donc que tous les députés d’opposition ou presque s’unissent. Hier, on l’a vu, les Républicains ont préféré rester neutres alors que le RN et la NUPES s’alliaient pour faire tomber le gouvernement. En vain, car le groupe de droite ne désire pas retourner devant les urnes, ce qu’a promis de faire le Président de la République en cas de vote d’une motion de censure.
Dissolution de l’Assemblée nationale
En France, le pouvoir exécutif définit le Parlement comme une institution qui doit accompagner son activité sans jamais le déranger. Cette mise au pas du parlement et ces critiques d’ordre antiparlementaire ne sont pas nouvelles. Elles ont traversé les siècles dans l’iconographie et les écrits politiques et reposent, sans distinction, sur les circonlocutions d’une Assemblée prétendue inefficace et soumise à d’incessants bavardages inutiles. Elles sont surtout le signe d’une concurrence historique entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.
La logique de la Ve République encourage et renforce cette définition de l’activité du parlement. Dès lors, l’actuelle configuration politique marquée par le regain de l’opposition parlementaire bouscule cette stabilité et réveille, avec elle, la concurrence historique entre nos deux institutions. Depuis la rentrée parlementaire, le président de la République fait planer la menace d’une dissolution de l’Assemblée en cas de motion de censure adoptée. L’effet fut radical, il a dissuadé bon nombre de députés de renverser le gouvernement.
« Emmanuel Macron a fait savoir exprès qu’une motion de censure entraînerait une dissolution et donc de nouvelles élections législatives. Les députés LR ne veulent pas retourner devant les électeurs et n’ont pas intérêt à le faire. Ce qui exclut donc la possibilité qu’ils votent la motion de censure »
Olivier Rozenberg, professeur à Science Po Paris à l’AFP
Depuis 1958, cinq dissolutions de l’Assemblée nationale ont eu lieu : en 1962, 1968, 1981, 1988 et 1997. Les quatre premières ont été une victoire pour le camp du Président et la dernière s’est soldée par une défaite. La dissolution fait partie des pouvoirs propres du Président. Toutefois, la dissolution de l’Assemblée est impossible dans trois cas de figure :
- dans l’année qui suit une première dissolution ;
- lorsque les pouvoirs de crise de l’article 16 sont appliqués ;
- pendant les périodes d’intérim de la présidence.
Après la dissolution, les élections législatives doivent être organisées dans un délai de 20 à 40 jours.
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