187 pays accessibles sans visa

187 pays accessibles sans visa

Le passeport, la pièce d’identité par excellence des Français de l’étranger, est aussi et surtout, avant tout, un outil pour voyager. Comme chaque année, un classement international compare les pays accessibles sans visa selon la nationalité, ce qu’on appelle communément la « puissance du passeport ». Alors quel puissance pour le passeport français ? On en profite pour faire un point sur l’origine de ce sésame.

Le passeport, une invention du XVème siècle !

L’usage du passeport se développe à partir du XVe siècle en France, mais également dans le Saint-Empire ou en Suisse, en remplacement des sauf-conduits qui, au Moyen Âge, étaient délivrés à des groupes de voyageurs (émissaires royaux, marchands, etc.) par leurs autorités pour garantir leurs droits lors de leurs déplacements.

En témoigne d’ailleurs l’apparition en 1420 du mot passeport dans la langue française. Le document, auparavant délivré à des groupes, se transforme petit à petit. Dans le courant du XIXe siècle, il est remis à des individus, ou du moins à des membres d’une même famille circulant ensemble.

Il s’agit pour les États non seulement de faciliter, mais aussi de limiter les mobilités de certains. Si l’arrivée trop importante d’indigents dans une région ou une ville fait toujours peur aux autorités de celle-ci, les départs de soldats et de marins, ou encore d’artisans et d’ouvriers, inquiètent tout autant – par crainte des désertions dans le premier cas, de la perte d’une main-d’œuvre éventuellement spécialisée dans le second.

Etreindre la population

Pour les États du XIXe siècle, il est essentiel, au moyen des passeports, d’« étreindre » leur population, pour reprendre les termes de l’historien américain John Torpey dans son ouvrage publié en français en 2000 sous le titre L’Invention du passeport. États, citoyenneté et surveillance. Cette « étreinte » vise à affirmer la souveraineté de l’État sur le territoire national ; à en permettre la défense par la conscription ; à percevoir les impôts ; à identifier et recenser les citoyens ; à leur accorder aide et protection pendant leurs voyages ; et enfin à contrôler les mobilités à une époque où elles connaissent une forte croissance.

Au fur et à mesure que chaque État se définit comme national, l’étreinte implique de surcroît l’établissement d’une distinction claire entre ses ressortissants et les étrangers, et donc des papiers pour la mettre en œuvre.

Le passeport et les autres documents d’identification (livrets militaires et ouvriers par exemple) deviennent, pour chacun, obligatoires pour se déplacer et, le cas échéant, décliner son identité. Tout au long du XIXe siècle, en France, mais aussi au Royaume-Uni, en Prusse, en Grèce ou dans l’Empire ottoman, des lois et règlements sont édictés pour préciser leur forme et leur usage.

Ainsi tout au long de ce siècle, les pays européens, mais également les Empires comme le russe ou l’ottoman, tâtonnent pour normaliser le format de leurs passeports. Imprimés sur un registre à souche et sur du papier spécial pour lutter contre les falsifications, ils comportent le nom et le sceau de l’autorité émettrice (consulat à l’étranger, gouverneur de province, ministère des Affaires étrangères, préfet de région, etc.), ainsi que la date et le lieu de délivrance.

Les informations sur le porteur du passeport s’affinent tout au long du siècle : à ses nom, prénom, date et lieu de naissance, profession, lieu de résidence, s’ajoutent des caractéristiques physiques précises. Sont ainsi mentionnés sa taille, la couleur de ses cheveux et de ses yeux, ses éventuels signes particuliers, et dans certains passeports, la forme de son visage, de sa bouche ou de son nez, la couleur de son éventuelle barbe ou moustache, de ses sourcils ou encore de son teint.

À l’extrême fin du XIXe siècle, sont créées de nouvelles méthodes d’identification par le corps (empreintes digitales, anthropométrie) pour améliorer la reconnaissance des individus. Inspirées des techniques de l’identité judiciaire et d’abord, à partir de l’extrême fin du XIXe siècle, appliquées à des personnes recherchées par la police et à des catégories sociales particulièrement surveillées (tels que les Tsiganes), elles s’étendent très vite. Le signalement de l’individu devient plus précis. Les passeports du début du XXe siècle comprennent souvent une photographie, de même que les empreintes digitales de leur détenteur.

Où voyager avec son titre français sans visa ?

On le voit c’est donc avant tout pour contrôler les flux migratoires que les passeports ont été mis en place. Mais au XXème siècle avec l’avènement du tourisme de masse, les Etats ont commencé à développer des politiques spécifiques pour ces voyageurs pour un court séjour mais aux revenus importants pour les pays qui les accueillent. Avec leurs voisins, puis peu à peu avec les pays, quel que soit l’éloignement, avec qui il aura été possible de créer des conditions de confiance, en particulier quant à l’acceptation de leurs ressortissants qui auraient dépassé les termes du voyage touristique.

La puissance du passeport est donc plus un indicateur des relations internationales de l’Etat émetteur qu’un avis sur la population qui peut en être bénéficiaire.

©passportindex.org

C’est ainsi que pour la septième année consécutive, le passeport japonais figure en tête du classement. Les ressortissants nippons peuvent voyager dans 193 pays sans visa. En 2022, le pays du Soleil levant avait gagné un pays de plus par rapport à l’index précédent. Le passeport singapourien occupe quant à lui le 2e rang, les ressortissants de la cité-État asiatique pouvant accéder à 192 pays sans visa, tout comme les Sud-Coréens.

Parmi les 199 pays évalués, ceux de l’Europe sont surreprésentés en tête de classement. Les passeports allemands et espagnols sont ainsi les plus puissants du Vieux Continent et ouvrent les portes de 190 pays sans visa. Quant au passeport français, il est placé au 6e rang, à égalité avec les passeports irlandais, portugais et britannique (187 pays). La République Tchèque (au 8e rang en 2022) et la Pologne (10e rang l’année dernière) gagnent toutes les deux une place.

Le Royaume-Uni et les États-Unis, qui occupaient la première place en 2014, sont distancés depuis par les pays d’Asie pacifique et de l’Europe de l’Ouest. Ils occupent respectivement les 6e et 7e rangs. En queue de classement, on trouve l’Afghanistan, l’Irak et la Syrie. Les ressortissants de ces pays peuvent se rendre respectivement dans 27, 29 et 30 pays sans visa.

Auteur/Autrice

  • Chantal Julia est maitre de conférence en Suisse. Après plusieurs années à l'Université de Lettre Paris 1, Chantal a suivi son compagnon à Lausanne où elle enseigne toujours la littérature française. Elle écrit pour différents magazines universitaires et Lesfrancais.press

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